Bien que de nature différente, ces deux affections ont ceci
de commun de se manifester aux mains, dont elles gênent les mouvements.
On réserve le nom de crampe des écrivains à un spasme
fonctionnel donnant lieu à une inaptitude de certains muscles des doigts de la
main, principalement ceux du pouce et de l'index, à se contracter régulièrement
pour retenir et diriger une plume pendant que les autres muscles de la main et
ceux de l'avant-bras conservent leur aptitude et leur force pour tout effort
plus énergique ou même pour toute action d'un autre genre. Cette crampe
s'observe, par exemple, chez ceux qui écrivent avec continuité pendant un temps
assez long et avec une excessive rapidité. La main se tourne dès qu'on essaye
de tracer un mot, de sorte que le bec de la plume regarde en haut sans qu'on
puisse s'y opposer.
Assez souvent ce spasme se produit même sans douleur ;
en d'autres cas, celle-ci se manifeste et peut même s'étendre aux muscles de
l'avant-bras.
Malgré son nom, les écrivains ne sont pas les seuls
tributaires de cette petite infirmité ; on l'observe chez des ouvriers
maniant avec continuité certains outils, chez des pianistes, chez des
escrimeurs, qui ne peuvent plus tenir correctement un fleuret ou une épée, qui
se tournent immédiatement en dedans dès qu'ils tentent de se mettre en garde.
Ce spasme peut s'accompagner d'une contraction involontaire,
plus ou moins douloureuse, des muscles extenseurs des doigts, avec ou sans
contraction des muscles fléchisseurs. On a signalé des cas, qui, à la réalité,
ne sont plus de simples crampes, où, lorsqu'on veut écrire, les doigts se
trouvent agités de mouvements plus ou moins forts, de véritables convulsions
qui, aussi bien que la simple crampe, empêchent de continuer ce que l'on avait
commencé à exécuter.
Le traitement consiste tout d'abord dans le repos de la
main, tenue à l'abri du froid ; on pourra recourir à des frictions
stimulantes et des massages doux de la main et de l'avant-bras ;
l'électricité peut intervenir sous forme de courants continus de faible
intensité ou de diathermie avec une électrode à la nuque, l'autre à l'extrémité
du membre. En général, on peut s'abstenir de toute médication interne ;
les bromures, les préparations de valériane sont rarement indiqués.
Maladie de Dupuytren.
— On a donné ce nom à la rétraction de l'aponévrose
palmaire, dont ce célèbre chirurgien a donné la première description et qui est
habituellement considérée comme un rhumatisme fibreux, limité à la main,
caractérisé par la formation de brides fibreuses qui mettent obstacle à
l'extension des doigts, tout d'abord, presque toujours, de l'auriculaire et de
l'annulaire, les autres doigts étant pris à un moindre degré et le pouce
exceptionnellement atteint.
Le début se fait à la paume de la main, sur son bord
cubital, par de petites indurations sous-cutanées, douloureuses à la pression,
le devenant spontanément par la suite, commençant à la face palmaire de la
première phalange ; ces indurations augmentent de nombre et de volume,
arrivent à se réunir, à se souder, sous forme de cordes, de véritables brides
fibreuses, adhérant à la peau et au tissu cellulaire sous-cutané, donnant lieu
non seulement à une gêne considérable des doigts, mais à un aspect spécial de
la paume de la main qui est excavée, les doigts, surtout les trois derniers,
étant fléchis, la phalange fléchie sur le métacarpe, la phalangine sur la
phalange, la phalangette restant habituellement indemne. La rétraction et la
flexion vont parfois jusqu'à ce que les doigts s'appliquent et s'incrustent
dans la paume, ce qui donne à la main une impotence fonctionnelle absolue.
Les brides fibreuses sont dues à un développement anormal
des expansions qui, normalement, se rendent de l'aponévrose palmaire à la face
profonde de la peau. La peau elle-même est atrophiée, amincie aux niveaux où
elle est soulevée par les bandes fibreuses ; les glandes sudoripares et le
tissu cellulaire sous-cutané sont également atrophiés.
Les douleurs spontanées, sous forme de chatouillements,
d'élancements, d'engourdissements, sont influencées par l'humidité, par le
changement de temps, par la position du membre, quelquefois par la chaleur du
lit.
La marche de cette affection est lente, presque fatalement
progressive ; elle peut frapper les deux mains, l'une après l'autre.
La maladie est parfois héréditaire ou causée par un état
général de rhumatisme, qualifié d'arthritisme ; elle survient aussi après
un traumatisme dû au transport de poids lourds (on l'observa une fois chez un
marchand de vins qui venait de descendre une barrique à sa cave) ou à l'usage
habituel de certains outils ou instruments, du fouet chez un charretier, de
l'épée chez un maître d'armes.
Le fait que cette affection est limitée aux mains la
différencie des autres formes de rhumatisme ou de goutte ; la rétraction
due aux tendons des muscles fléchisseurs ne respecte pas la dernière phalange ;
à première vue on pourrait penser à une plaie, à une brûlure de la main ;
les commémoratifs et l'aspect des lésions évitent l'erreur.
Comme traitements, on recourt souvent à l'emploi des iodures,
des salicylates, de l'aspirine ou de leurs dérivés par voie interne, à des
pommades à base des mêmes médicaments en massages locaux. Certaines cures
thermales sont souvent utiles. À défaut, il faudra recourir à une intervention
chirurgicale venant sectionner les brides, suivie de massages et d'exercice, de
rééducation des doigts.
Le régime sera celui des rhumatisants, excluant simplement
l'abus des viandes noires, des plats trop épicés, de l'alcool, sans aller
jusqu'à débiliter le malade.
Dr A. GOTTSCHALK.
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