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Les amendements et les fumures

Tout végétal ne peut se développer d'une façon normale que si le milieu de culture répond à ses besoins physiques. C'est ainsi que, pour être fertile, une terre ne doit être ni trop acide, ni trop alcaline.

Pour être rationnelle, une culture doit être autant que possible effectuée dans un sol dont l'acidité n'est pas excessive. Ce qui est souvent le cas dans les terres de jardin, où les apports de fumier sont fréquemment considérables. Dans ces conditions, les pertes de chaux par décalcification sont très importantes. Il résulte de ce fait que si, par le marnage ou le chaulage, on ne restitue pas à la terre le calcaire disparu, sa production deviendra de plus en plus faible. Ce qui la caractérise alors, c'est l'apparition de maladies particulières, telles que la hernie du chou, l'impossibilité d'y obtenir normalement ; choux, navets, radis, oignons, épinards, etc.

L'utilisation dans les jardins potagers des engrais chimiques de synthèse, phosphatés et azotés, et de sels de potasse, a également comme résultat d'intensifier les pertes en chaux du sol.

Mais, s'il y a nécessité de restituer ce dernier élément à la terre, il est non moins important de lui rendre les principes fertilisants qui, en plus de la chaux, sont entraînés dans le sous-sol par les eaux de pluie et d'arrosages. Ainsi la magnésie, qui se trouve normalement dans le sol sous forme de carbonate, a la particularité, étant beaucoup plus soluble que la chaux, d'être entraînée dans le sous-sol avec beaucoup plus de rapidité encore qu'elle. Le manque de magnésie dans une terre peut entraîner des diminutions très sensibles de rendement, car cet élément entre dans la constitution de la matière verte des feuilles et joue ainsi un rôle très important dans le développement des plantes.

La magnésie peut être restituée au sol par l'emploi de carbonate double de chaux et de magnésie.

De plus, la tendance actuelle que l'on a à remplacer le sulfate d'ammoniaque et les superphosphates par des engrais contenant des proportions beaucoup plus fortes d'acide phosphorique, mais ne renfermant plus de chaux, a comme effet, au bout de quelques années, d'occasionner des troubles alimentaires graves qui seront dus à la pénurie simultanée de soufre, de chaux et de magnésie. Cette carence sera encore intensifiée si l'on utilise en même temps des sels de potasse à haute dose (chlorure double ou chlorure de potassium pur).

À la suite d'expériences répétées, il résulte que le chlorure de potassium donne de meilleurs résultats dans les fumures que le sulfate de potasse et que le chlorhydrate d'ammoniaque est supérieur au sulfate d'ammoniaque à égale dose d'azote. Toutefois, cette manière d'opérer aura comme effet de diminuer l'apport de soufre, ce qui contribuera à augmenter la carence du sol en cet élément.

Il est donc indispensable, en cas d'applications continuelles de chlorure de potassium dans les jardins, de maintenir le sol toujours pourvu de sulfates. Ce que l'on obtient facilement en répandant du plâtre (qui, de préférence, sera du plâtre cru).

Quelles que soient les précautions que peut exiger l'emploi des engrais potassiques, on ne saurait négliger l'utilisation de cet élément. Plus que la magnésie, la potasse joue un rôle essentiel dans la vie des plantes. Elle paraît être à la base des phénomènes de turgescence qui maintiennent les plantes rigides ; elle facilite la formation des fruits et favorise leur maturité. Les engrais potassiques ont également la particularité d'augmenter la résistance des plantes au froid.

Le manque de potasse se manifeste chez les végétaux par la coloration des feuilles, qui sont d'un vert grisâtre, et qui ont une tendance à tomber prématurément.

La potasse fait surtout défaut dans les terres légères, calcaires ou tourbeuses.

Les engrais potassiques ont, d'autre part, la propriété d'activer l'efficacité des engrais azotés. On doit en déduire qu'il ne faut jamais utiliser un engrais azoté seul, mais qu'il doit toujours être accompagné d'un apport d'engrais potassique, sinon les plantes cultivées ont des feuilles qui prennent une teinte bronzée et sont particulièrement sensibles aux attaques des parasites.

Quant au manque de phosphore dans le sol, il se traduit par un aspect gris bronzé des feuilles et la formation de taches brunes ou pourpres à leur surface.

L'apport d'acide phosphorique soluble intensifie la couleur verte des feuilles, ainsi que leur épaisseur, favorise le développement du système radiculaire, ainsi que la formation et la maturation des fruits.

Parmi les formules d'engrais susceptibles d'être utilisées, la meilleure est celle qui comporte l'adjonction de phosphate soluble à la potasse soluble, puis viennent les combinaisons d'azote soluble et de potasse soluble ; le plus mauvais de ces mélanges est celui constitué par l'association d'engrais azotés solubles à des engrais phosphatés solubles qui, faute de potasse, n'a qu'une action médiocre.

Notons que les engrais contenant les trois aliments, mais où la potasse et l'acide phosphorique dominent l'azote, donnent, de beaucoup, les meilleurs résultats.

A. GOUMY,

Ingénieur horticole.

Le Chasseur Français N°670 Décembre 1952 Page 735