Qu'est-ce que le schéma actantiel ?

Depuis la sémantique structurale de A.J. Greimas et depuis les "Deux cent mille situations dramatiques" de Souriau et dans le droit fil des travaux de W. Propp sur les contes russes, on sait construire un modèle de base, une syntaxe, à l'aide d'unités nommés les actants (par Greimas) et qui ne peuvent pas s'identifier à des personnages.

Parcours rapide. Parcours conseillé.


Pour en savoir plus:


1. Une présentation complète du modèle a été faite par A. Ubersfeld (1974). On y trouvera aussi ses commentaires et quelques propositions de transformations car elle l'adapte au texte théâtral (p. 58 à 118). Nous lui empruntons ici les éléments de cet exposé.

"Le modèle actantiel, dit Greimas, est en premier lieu l'extrapolation d'une structure syntaxique. Un actant s'identifie donc à un élément (lexicalisé ou non, un acteur ou une abstraction) qui assume dans la phrase de base du récit une fonction syntaxique : il y a le sujet et l'objet, le destinataire, l'opposant, l'adjuvant, dont les fonctions syntaxiques sont évidentes ; le destinateur dont le rôle grammatical est moins visible et qui appartient si l'on peut dire à une phrase antérieure (D1 veut que S...) ou, selon la grammaire traditionnelle, à un complément de cause."

Greimas a simplifié le modèle de W. Propp et de Souriau qui présentait 7 fonctions. Ici, 6 cases correspondent à 6 fonctions dans le récit.

La phrase implicite dans le schéma est celleci : une force (ou un être D1) veut quelque chose. Conduit par son action, le sujet S recherche un objet O dans l'interêt ou à l'intention d'un être D2 (concret ou abstrait). Dans cette recherche, le sujet a des alliés A et des opposants OP. Tout récit peut se réduire à ce schéma de base qui visualise les principales forces du drame et leur rôle dans l'action. Il est d'autant plus aisé d'établir ce schéma (ou des schémas transitoires) lorsque la structure polémique du récit (pour parler comme C.Brémond) est bien apparente (histoire simple avec une structure canonique). Notons que Greimas est revenu sur ce schéma, notamment sur les notions d'adjuvant et d'opposant.

2. La notion d'actant .

W.Propp dans son étude de la structure des contes met l'accent sur l'action au détriment de l'agent, remettant déjà en question le personnage . "Dans l'étude du conte, la question de savoir ce que font les personnages est la seule importante ; qui fait quelque chose et comment il le fait sont des questions qui ne se posent qu'accessoirement."

En tant qu'élément d'une relation, d'une fonction, l'actant fait partie d'une syntaxe narrative profonde et il s'incarnera dans un (ou des) acteur(s) dans les discours particuliers, acteur de récit ou acteur de théâtre.

L'actant est élément d'une structure syntaxique qui peut être commune à plusieurs textes, l'acteur est en principe l'acteur d'un récit ou d'un texte déterminé (l'actant "princesse" que l'on retrouve sous des noms différents dans les contes, par exemple).

"Ainsi dans les Fourberies de Scapin, Scapin, quel que soit son rôle actantiel (destinateur, sujet ou adjuvant, selon le modèle construit et selon les séquences), est l'acteur-fabriquant des fourberies, celui dont l'action répétitive est de duper les autres...." (A. Ubersfeld)

Inversement, plusieurs personnages subsumés par un même acteur peuvent être le même actant et cette reduplication constatée peut être source de comique, signifiante et constituer comme dans les contes ou les sotties, ou les farces une règle du genre. Ainsi l'acteur "précieuse" dans les Femmes savantes qui recouvre trois précieuses-personnages : Philaminte, Armande, Belise au rôle actantiel identique. On exclut Trissotin dont le fonctionnement est différent (d'ailleurs de sexe différent).

Il est donc nécessaire de prendre en compte trois niveaux de présence du personnage : l'actant, l'acteur et l'individu qui a en charge le rôle lorsque l'on réfléchit à ce que peut être le schéma actantiel d'une histoire (ou aux schémas des différentes séquences).

Retour à l'index de la zone jaune. Parcours conseillé