De Bagdad où les califes ont créé une Université, des professeurs essaiment dans le monde méditerranéen et transforment les hospices religieux en hôpitaux-écoles. Vers 1200, Bagdad est ruinée par l'invasion des Mongols. Les professeurs et les élèves en exil facilitent la création des premières universités en Occident : Bologne (1088), Salerne (1140), Padoue (1222), Paris (1220), Montpellier (1272) où enseignera le chirurgien le plus célèbre du XIVe siècle, Guy de Chauliac, médecin des papes d'Avignon, Clément VI, Innocent VI et Urbain V. Ses ouvrages feront autorité pendant deux cents ans. Sa "Chirurgica magna" étudie tous les aspects de l'art médical, avec la matière médicale riche de 750 médicaments. L'université de Toulouse est créée en 1224 par le pouvoir royal pour extirper l'hérésie cathare.
A
l'origine composées exclusivement de clercs, les facultés
de médecine s'ouvrent aux laïcs à condition qu'ils soient
célibataires jusqu'en 1452, date à laquelle le cardinal d'Estouteville
abolit l'obligation du célibat. L'enseignement essentiellement oral
consiste à commenter Hippocrate, Galien, Avicenne, Averroès,
Dioscoride sans remettre en question le contenu scientifique de leurs oeuvres
mais en développant les qualités de logique et de dialectique
dans l'argumentation. De rares dissections sont faites par des barbiers
sous l'autorité d'anatomistes, les premières dissections ayant
lieu à Bologne, Padoue, Montpellier. Le savoir médical du
temps qui englobe les mathématiques, la cosmologie, l'astrologie,
les sciences naturelles, l'alchimie a des origines religieuses, scientifiques
et populaires.
Le savoir populaire allie pensée magique, recours aux saints
guérisseurs, réincarnations des dieux païens et connaissances
empiriques essentiellement botaniques transmises de génération
en génération. Le courant scientifique (héritier
du monde antique) représenté par l'école de Chartres
dont le fondateur, l'évêque Fulbert (960-1026), fut le disciple
de Gerbert, le pape de l'an mil sous le nom de Sylvestre II s'oppose au
courant mystique selon lequel seules les idées immuables et
éternelles sont importantes et à la pensée rationnelle
d'Aristote. Pour intégrer ces concepts, l'Eglise favorise, au XIIe
siècle, l'essor des universités avec un moule théologique,
la Scolastique qui tente un équilibre entre raison, révélation
et expérience.
Au
XIIIe siècle, des doctrines nouvelles apparaissent. Albert le Grand
(1193-1280), voyageur infatigable, curieux de tout, en particulier de physique
et de chimie, vulgarisateur d'Aristote, expose sa doctrine lors de harangues
aux Parisiens sur la place qui porte actuellement son nom, la place Maubert
(Maître Albert). Provincial des Dominicains, il aura pour élève,
Thomas
d'Aquin, alchimiste, théologien, philosophe dont les reliques reposent
sous le maître-autel de l'église des Jacobins de Toulouse,
église de la maison mère des Dominicains. Albert le Grand
fait connaître divers composés chimiques : potasse caustique,
acétates de plomb et de cuivre.
Albert est le fils cadet du comte de Bolstaedt, au bord du Danube. Il entre vite dans les ordres et devient dominicain. Il s'intéresse à la philosophie, la médecine, la théologie, les mathématiques, l'alchimie, la minéralogie, la botanique et autres. Dans de minerabilus, il décrit les procédés de sublimation et de distillation. Sa vision de l'alchimiste fut celle d'un expérimentateur. En 1245, il va à Paris pour devenir maître, et enseigner. Ses vastes connaissances le désigne comme le plus grand savant de son époque, et il fut surnommé le docteur universel. Ses cours étaient si prisés qu'il du aller enseigner en plein air, place Maubert (Contraction de Maître Albert, ou de mauvais Albert suivant les versions). Il enseigna des théories basées sur Aristote et Avicenne, laissant peu de place à l'expérimentation. Sur quoi Bacon, un de ses anciens élèves, le critiqua ouvertement. Il meurt en 1280 et est canonisé par le pape Pie IX en 1931. Des ouvrages anonymes de recettes magiques reprennent son nom, Le Grand Albert et Le Petit Albert.
Les
universités favorisent le développement des sciences et de
la réflexion en Occident. De même, les côtes occidentales
de l'Asie mineure, Athènes, Alexandrie, Bagdad, Tolède, ont-elles
été tour à tour le centre de recherches scientifiques.
Au contraire, pendant très longtemps, l'Égypte antique et
la dynastie babylonienne, puissantes et stables, n'ont pas vu leur science
progresser, même si, au début, étaient apparus des écrits
mathématiques de haut niveau. Leur véritable rayonnement n'a
débuté qu'après l'importation de cultures presque totalement
différentes. Il apparaîtrait que la science ait besoin d'un
terrain riche et fertile, où l'on puisse sans cesse explorer et confronter.
Chaque progrès de la science semble lié à un personnage
scientifique qui sort du rang et écrit un ouvrage remarquable. Toutefois,
les scientifiques ont toujours eu besoin d'être formés dans
des institutions académiques. Ainsi, y a-t-il eu l'Académie
de Platon et celle d'Alexandrie, l'école fondée par Pythagore
ainsi que Bait al-hikma du calife al-Mamum. Chacune de ces institutions,
animée par des hommes exceptionnels et soumise à des règles
de fonctionnement, a perduré des siècles, voire un millénaire.
Les universités, quant à elles, créées à
partir du XIIe siècle, ont joué un rôle encore plus
important, tout en contribuant au progrès de la science à
l'époque de la Renaissance et au XVIIe siècle.
Les Alchandreana forment un corpus de traités et de fragments dastrologie qui furent traduits et adaptés de larabe en Catalogne dans la seconde moitié du Xe siècle. Le plus connu de ces traités est le Liber Alchandrei philosophi (ou Mathematica Alhandrei), qui deviendra plus tard, au fil de remaniements successifs, le fameux Livre dArcandam, dont il subsiste plus de 20 éditions des XVIe et XVIIe siècles en latin, en français et en anglais.
Du point de vue historique, lintérêt des Alchandreana tient au fait quils représentent à la fois les plus anciens traités astrologiques latins du Moyen Age et les plus anciens textes scientifiques dorigine arabe. Du point de vue technique, les Alchandreana ont introduit en Occident toute une série de doctrines astronomiques et astrologiques relatives aux planètes et aux signes du zodiaque, et se distinguent des traités classiques par la place centrale accordée aux mansions lunaires et à la théorie des heures planétaires, ainsi que par les méthodes de calcul de lhoroscope, lesquelles prennent en considération non pas la date, lheure et le lieu de naissance du sujet, mais les valeurs numériques de son nom (onomatomancie). Ces traités sont aussi les premiers textes de lOccident chrétien où se manifeste une attitude résolument positive à légard de lastrologie, encore officiellement frappée par les condamnations des Pères de lEglise.
Dans le prologue dun texte annexé au Liber Alchandrei et couché sous la forme dune lettre adressée par le Chaldéen Argafalau à Alexandre le Grand, lastrologie est même présentée comme un savoir supérieur à la philosophie (dont Platon est cité comme lillustre représentant) car elle permet de découvrir les choses cachées et de prédire le futur. Un second texte annexé au Liber Alchandrei, le Breviarium Alhandrei summi astrologi, se propose justement de découvrir les choses cachées au moyen dun jeu complexe de combinaisons de lettres arabes et hébraïques, identiques à certaines méthodes qui seront appliquées plus tard dans la kabbale. « Alchandreus » (ou « Alhandreus » parmi dautres variantes) nest pas identifié mais il sagit sans doute dun nom arabe, dans lequel il faut peut-être reconnaître le philosophe al-Kindi, auteur de plusieurs traités dastrologie (touchant notamment aux mansions lunaires) et qui, au témoignage dIbn Khaldun, aurait été le premier à mêler la science des lettres à lastrologie dans un ouvrage aujourdhui perdu, le Kitab al-Jafr.
Les Alchandreana ont connu un succès important pendant tout le Moyen Age : ils sont conservés dans plus de 50 manuscrits et ont servi de sources à plusieurs textes dastrologie et de philosophie naturelle, comme les Iudicia attribués à Ptolémée et à Aristote (XIe siècle ?), le Liber iudiciorum de Raymond de Marseille (après 1140), le Liber de tribus generalibus iudiciis astronomie de Roger de Hereford (XIIe siècle), le Liber introductorius de Michel Scot (XIIIe siècle), les Decem tractatus de Guido Bonatti (XIIIe siècle) et le De occulta philosophia dAgrippa (vers 1510).
Michel Scot (1175-1232), astrologue de Frédéric II, devin célèbre, mais aussi linguiste, traduit notamment les commentaires d'Ibn Rushd sur l'oeuvre d'Aristote et un texte d'astronomie d'Al-Bitruji. Il est considéré comme le fondateur de laverroïsme. Il combat l'atomisme de Lucrèce et la thèse de la pluralité des mondes, au profit d'une cosmologie strictement aristotélicienne.
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