Un épisode écrit (en collaboration avec Carter et Spotnitz) et réalisé par David Duchovny, où on retrouve un tout petit peu l'esprit original des X-Files.
1°) Départ de William :
Indice anecdotique mais révélateur de l'état d'esprit des auteurs : au début (le drapeau) et à la fin de l’épisode (le mobile de William chez ses "nouveaux" parents), on voit plusieurs références à un bison blanc. Il s'agit d'un clin d'oeil au monologue d’Albert Hosteen dans 3X02 Paper Clip. Rappel : La légende du bison blanc (un présage de bouleversement annoncé par les dieux) et le destin tragique du petit animal étaient à mettre à l'époque en parallèle avec le destin de Mélissa Scully. Le parallèle funeste reste valable pour William. En effet, une tradition indienne veut que ce bison blanc ait été une femme descendue du ciel pour enseigner aux Indiens comment prier (William est littéralement un fils des dieux ou des étoiles puisque ses deux parents sont déjà des demi-dieux, hybrides humains/aliens) et que ncette femme soit ensuite repartie sous l'apparence d'un bison blanc, promettant de revenir un jour. Or cette promesse ne fut jamais tenue. Le constat fait à l'époque de 3X02 Paper Clip d'une défaite des dieux indiens face aux machinations des hommes blancs peut être ici appliqué à la défaite acceptée de Scully (et Mulder puisque c'est Duchovny qui réalise l'épisode) et William sera lui aussi un agneau sacrifié sur l'autel de la Conspiration du silence.
Les scénaristes se débarassent donc avec peu d'élégance d'un personnage (William) devenu encombrant maintenant que la série s'achève. Cependant, la potion n'est pas tout à fait aussi amère qu'il y paraît. Tandis que Samantha Mulder ou Melissa Scully ont payé de leurs vies l'obstination de Mulder (et Scully) à démasquer les comploteurs du Syndicat, William sera - on peut l'espérer - épargné au prix d'un éloignement définitif de sa mère. Pour la première depuis neuf ans, l'espoir se transfère sur la génération suivante. Mulder parti, Scully fataliste, Doggett et Reyes impuissants, c'est sur les épaules de William que repose l'avenir.
2°) Retour de Spender :
La réussite de l'épisode, c'est l'idée mailicieuse et brillante de David Duchovny de jouer avec sa propre absence encombrante (ses crayons sont restés plantés dans le plafond !) en faisant prononcer le nom de Mulder toutes les trois répliques sans que sachions QUI est réellement le personnage défiguré qui est venu clandestinement cambrioler le bureau des Affaires Non Classées.
La scène où Doggett fait des pompes (1496, 1497, 1498...) en lisant un rapport et s'écroule avant d'arriver à 1500 est hilarante et... jette un regard cruellement ironique sur le successeur de Mulder.
Mais l'ensemble manque de cohérence (Pourquoi Scully emmène-t-elle Spender chez elle ? Pourquoi lui montre-t-elle des dossiers que même Doggett et Reyes n'ont pas vus ?) si bien que le spectateur se demande tout du long POURQUOI et POUR QUI Jeffrey Spender roule.
Il dit d'abord avoir rencontré Mulder et tente de faire croire qu'il sait beaucoup de choses sur lui. Cette stratégie ayant été torpillée par Scully - elle refuse en fait d'entendre jusqu'au bout un discours qui pourrait s'avérer trop douloureux à entendre - Spender confie alors qu'il a agi pour se venger de son père - l'Homme à la Cigarette (CSM) - qui l'a laissé pour mort après avoir tiré sur lui à bout portant (cf. 6X12 One Son) - autre invraisemblance !
Ce deuxième point rencontre néanmoins l'oreille de Scully, mais c'est à présent le spectateur qui se demande si la compassion (ou la solitude ?) n'est pas mauvaise conseillère. Pourquoi Scully n'est-elle pas plus méfiante envers un homme qui a cherché à lui nuire il y a trois ans ? La mention du nom de Mulder l'aurait-elle perturbée plus qu'elle ne le laisse paraître ?
Ensuite, la fausse piste de l'ADN est originale mais elle n'apporte en réalité que peu de rythme à cet épisode globalement assez molasson. Car nous savions déjà que Spender et Mulder sont demi-frères. Il est donc logique que leurs ADN soient très proches, mais le (petit) suspense réside dans l'hypothétique apparition de Duchovny à l'écran. Le réalisateur (DD) réussit à ne pas montrer Mulder en chair et en os mais il va plus loin que les reprises d'images d'archives qui avaient servi à alimenter l'épisode 9X06 Trust No 1 : telles les brèves séquences où Hitchcock se met en scène, un David Duchovny mal rasé apparaît l'espace d'une seconde dans l'oeil de Gillian Anderson, quand Scully envisage furtivement que l'homme défiguré pourrait être Mulder.
3°) Une première conclusion :
Il est évident que cette histoire "bancale" a été conçue dans le but de "faire réviser" le spectateur avant le tout dernier épisode de la série en accréditant le possible retour de Mulder et en laissant planer un doute sur le sort réel des personnages que nous tenions pour morts ou disparus, tels que Diana Fowley, Jeffrey Spender, CSM, Alex Krycek, Billy Miles, Knowle Rohrer et pourquoi pas Gorge Profonde et X.
Enfin, il s'agit de bien nous faire comprendre avant la fin que William est un hybride humain/alien comme ses parents Mulder et Scully. Mais le tout nous est martelé avec une telle insistance que le désenchantement est proche : les mystères et les énigmatiques changements de direction qui faisaient le charme des X-Files appartiennent désormais au passé...
génération suivante : la problématique générationnelle a été amplement développée par Cécile Laumonier sur son site Aux Frontières du Sens.