Qu'est-ce qu'un titre ?

"Un apéritif" selon Barthes, insistant ainsi sur son rôle d'ouverture au texte. Une contrainte interprétante et donc un index qui dirige l'attention sur l'objet du texte en donnant sur lui plus ou moins d'informations. Il y a des titres dicents et des titres plus "mystérieux", plus rhématiques, parfois même de nature symbolique.

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R. Barthes (1985) abordant l'étude d'une nouvelle d'E. Poe intitulée "La vérité sur le cas de M. Valdemar" évalue la fonction du titre. Le titre est "un opérateur de marque", (il) "a pour fonction de marquer de début du texte, c'est-à-dire de constituer le texte en marchandise", "le récit est une marchandise, dont la proposition est précédée d'un "boniment", d'un "appetizer".

Dans l'analyse du titre ci-dessus, il montre comment l'enquête à propos de l'objet du récit commence avec celle de l'objet du titre (vérité suppose énigme, cas suggère un fait exceptionnel, la, article défini impose qu'il n'y a qu'une vérité, -celle des faits exacts mais aussi celle de leur sens- enfin l'analyse du nom propre est riche de significations puisque c'est "le prince des signifiants").

Barthes souligne encore une fois l'utilité du nom propre (et les titres en comportent le plus souvent) "Un nom propre doit être toujours interrogé soigneusement".

Nous dirons que le titre est un début de la sémiosis d'interprétation du texte. Il sollicite dès sa lecture les interprétants qui vont être par la suite exploités. C'est donc un signe-action qui déclenche l'interprétation et l'objet du titre devient le signe de l'objet du roman avec lequel il est en relation.

Il est évident que cette activité du lecteur suppose un habitus, que ce lecteur sait qu'il s'agit d'une "marchandise", qu'elle est la fonction du titre et qu'il sait en principe en apprécier la valeur ou l'intérêt. Certains écrivains ou artistes sont d'ailleurs amenés à s'expliquer sur leurs titres, et U. Eco l'a fait à propos de "Le Nom de la Rose", titre volontairement énigmatique et en cela iconique de son roman. Certains créateurs, il faut le remarquer, refusant de jouer le jeu habituel du titre, voulant tromper l'attente du lecteur ou du spectateur dans ce domaine, inventent un titre qui n'a rien à voir avec l'oeuvre à première vue. U. Eco faisait d'ailleurs remarquer que le titre doit garder un peu de mystère, ne pas fournir trop d'indices au lecteur.

Le titre est donc un parti-pris de l'auteur intéressant à analyser et qui rend compte de ses principales intentions, car il focalise l'attention sur ce qui paraît être pour le créateur l'objet essentiel du roman. (Le film tiré du roman de Zola, "L'Assommoir" porte le titre de "Gervaise" : l'intérêt s'est déplacé et le titre en dit déjà assez sur la différence qui peut exister entre l'oeuvre littéraire et l'histoire du film).

Si l'analyse du titre préalable à celle du roman offre l'intérêt de l'enquête, la rétrolecture du titre après avoir pris connaissance du texte est aussi intéressante évidemment et complémentaire. ("Vipère au poing" d'Hervé Bazin, un joli titre que le dernier chapitre vient élucider complètement, didactiquement même, mais dont le sens commence à percer dès le premier chapitre).

Une typologie des titres est possible en tant que signes linguistiques (le titre de la nouvelle d'E Poe est une proposition, donc un symbole dicent). Mais il resterait à faire celle des relations entre l'objet du titre et celui du texte.

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