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De la phase laminaire
qu'il quitte, le fluide garde la propriété de s'organiser
en couches séparées. La nouveauté est que ces couches
se coupent et commencent à s'interpénétrer localement.
Par exemple, la couche la plus rapide peut se casser en morceaux qui se
mettent à tourner sur eux-mêmes de telle sorte que la vitesse
moyenne résultante soit compatible avec la vitesse de la couche
la plus lente. Si le freinage de la couche rapide est très sévère,
on peut se trouver avec des morceaux laminaires complètement coupés
les uns des autres et parfaitement fixes. C'est par exemple ce qui se passe
juste derrière la voile d'un bateau lorsqu'on la borde trop.
De façon générale, un fonctionnement de type intermittent caractérise toutes les formes que peuvent prendre ces régimes intermédiaires. Dès que les deux régions s'affrontant atteignent un écart de vitesse insoutenable, il se produit une cassure qui annule complètement ce différentiel et lui permet de recommencer à enfler. Le différentiel de vitesse recommence alors à s'accuser jusqu'au retour d'un nouveau point où il devient excessif : tout se brise à nouveau et le processus recommence indéfiniment. |
Aux alentours de 1900,
la société occidentale continue d'accélérer
ses transformations sous l'effet des développements techniques incessants.
Son organisation en différentes couches sociales et classes sociales
rangées l'une sur l'autre s'avère alors insuffisante pour
l'adapter au brassage de plus en plus fort qui s'effectue. Comme pour un
fluide, ce brassage des couches commence par des interpénétrations
intermittentes l'une dans l'autre : certains vont pouvoir s'incruster dans
des couches supérieures, tandis que d'autres inversement dégringoleront
la pente. Mais cela n'ira jamais très loin : l'ascension sociale
ne fait pas oublier la couche sociale dont on est issu et qui implique
une limite à cette ascension. À l'inverse, on peut toujours
se récupérer de déboires financiers lorsqu'on appartient
à une famille puissamment installée.
Les qualificatifs
de "nouveau riche" ou de "parvenu" ne sont pas des exclamations d'admiration
pour l'efficacité ayant permis le succès, mais l'accent mis
sur l'impossibilité de se fondre et de s'intégrer complètement
dans une couche sociale différente de la sienne et où l'on
vient de pénétrer.
Qu'y a
t'il de paradoxal dans les interpénétrations localement répétées
de couches laminaires ?
Dans une telle dynamique
une partie d'une couche laminaire se sépare de la couche à
laquelle elle appartient pour se rassembler, s'interpénétrer
avec une partie d'une autre couche qui va en sens contraire ou qui va à
une vitesse trop antagoniste de la sienne pour que la transition de vitesse
reste graduelle. Cette dynamique rassemble donc par le fait même
qu'elle sépare, elle rassemble
/ sépare.
On peut envisager
ce paradoxe d'une seconde manière : par ces interpénétrations
deux couches laminaires se rassemblent, mais ces rassemblements se produisent
localement, en des lieux nécessairement écartés, donc
séparés les uns des autres.
Traduction
dans l'art et la musique du paradoxe "rassembler / séparer"
Pour une raison que
nous expliquons ailleurs [ F
voir cette explication] ce n'est qu'à l'étape suivante
de l'évolution de la société que ce paradoxe sera
le paradoxe caractéristique de l'architecture. Il correspond à
un fonctionnement de la société occidentale qui commence
à s'installer vers le milieu du XIXème siècle, mais
il ne sera un paradoxe dominant dans l'oeuvre de certains architectes qu'à
la fin de ce siècle et au tournant du suivant, dans le style usuellement
appelé de l'Art Nouveau. Du fait de la transformation de plus en
plus rapide de la société, pour la première fois on
voit cohabiter des artistes dont la complexité interne fonctionne
de façons différentes, différentes car elles ne relèvent
pas de la même étape de la complexité. Nous devons
donc faire une distinction entre les expressions de l'Art Nouveau qui relèvent
de ce paradoxe et les expressions qui relèvent du paradoxe précédent.
Nous avions appelé les premières Art Nouveau -1-, nous appellerons
celles-ci Art Nouveau -2-.
è
architecture deux exemples d'architecture de
l'Art Nouveau -2- :
Mackintosh : la salle de réception de la "Maison d'un Amateur d'Art"
Olbrich : porte de la maison Glückert à Darmstadt
è
musique les expressions
caractéristiques de cet effet
Et l'architecture
de la société qui "rassemble / sépare" ?
Comme indiqué
au début du paragraphe précédent, le paradoxe en jeu
dans l'architecture d'une époque est toujours en retard d'une étape
sur l'évolution des paradoxes en jeu dans la dynamique même
de la société.
La dynamique précédente
de la société était fondée sur le paradoxe
"homogène / hétérogène", c'est donc ce paradoxe
qui fonctionne dans l'architecture qui correspond à la société
qui "rassemble / sépare".
On peut :
è
aller voir l'explication de la cause de cette situation paradoxale homogène
/ hétérogène
è
voir directement des exemples de l'architecture homogène / hétérogène
qui forme l'Art Nouveau -1-
(Van de Velde : le magasin de la Havana-Compagnie à Berlin
et Guimard : station de métro Porte Dauphine à Paris)
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