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avant
: E
phase du classement paradoxe
3 |
G
tableau
complet
|
suite
: F
phase de l'organisation
paradoxe 1 |
cycle
du noeud
phase
de l'organisation - paradoxe 0
allées
tourbillonnaires
Société
autour de 1900
|
Nous reprenons donc
encore une fois notre fluide qui était parvenu à
l'étape précédente à organiser ses
couches laminaires en spirale è
[rappel dans une autre fenêtre], et nous nous demandons
ce qui lui arrive si ses différences de vitesses internes s'accroissent
encore.
[nota : on peut
trouver une présentation de ce nouveau phénomène physique
dans l'analyse du 4ème paradoxe de la
Vénus de Lespugue dans la brève histoire de l'art]
Comme on l'a vu à
plusieurs reprises, ce qui est acquis est acquis. Le mouvement brownien
fonctionnait toujours à l'intérieur de chaque couche du liquide
lorsqu'il avait pris son fonctionnement laminaire, et l'organisation en
couches séparées perdure dans l'organisation de la spirale.
Donc la spirale est un acquis, et elle va nécessairement se conserver
dans ce qui va maintenant arriver au fluide.
Puisque la spirale
demeure, elle se forme. Mais à partir d'un certain moment, rien
ne va plus : certaines parties du fluide s'échappent trop vite et
la spirale n'a pas le temps de les organiser. Puisque la spirale ne parvient
plus à organiser le fluide qui arrive, elle s'interrompt, et du
fluide s'en écarte. Puisque ce qui est acquis est acquis, et que
l'organisation en spirale est acquise, nécessairement ce liquide
récalcitrant à son tour s'enroule lui-même en spirale.
Et puisque la spirale précédente a montré son incapacité
à prendre en charge la totalité du différentiel de
vitesse, il n'y a aucune raison pour que la nouvelle réussisse mieux.
Alors la nouvelle spirale s'interrompt à son tour, et une autre
spirale reprend de l'autre côté, du même côté
qu'était partie la première spirale. Tel est le mécanisme
selon lequel on peut décrire la naissance des tourbillons qui partent
l'un derrière l'autre, en alternant de côté, et que
l'on voit parfois se former dans l'eau derrière les piles d'un pont.
Les physiciens ont
donné un nom très poétique à cette organisation
caractéristique d'un fluide : ils appellent cela des "allées
tourbillonnaires de von Karman", du nom d'un grand "mécanicien des
fluides" d'origine hongroise von Karman, qui trouva en 1911 une expression
mathématique rendant compte de ce type de phénomène.
allée tourbillonnaire de von Karman en
avant d'un cylindre
[d'après un cliché S. Taneda, Université
de Kyushu (tiré de M. Van Dyke- 1982)
extrait de "La Turbulence" de Marcel Lesieur aux
Presses Universitaires de Grenoble]
On donne ci-dessus
la photographie d'une telle allée tourbillonnaire, obtenue en laboratoire.
On peut très nettement y distinguer l'amorce de spirale que constitue
chaque tourbillon. À un endroit de son tracé, chaque spirale
a son bras qui s'est scindé au moment précis où elle
a échoué à organiser le liquide. À partir de
cette cassure, une branche de la spirale continue en aval jusqu'à
l'embranchement où elle a commencé à remplacer la
spirale précédente, et l'autre branche la relie en amont
à la spirale qui s'est formée à sa suite.
Au passage remarquons
que, dans cette situation, ce qui arrive à une spirale se répercute
sur les spirales voisines : si par exemple l'une se gonfle excessivement,
les autres vont tirer dessus pour la ramener à de plus justes proportions
dans l'intérêt de la bande. Les spirales successives se conduisent
ainsi comme un groupe solidaire, alors que chacune forme pourtant une unité
indépendante, au point même de fonctionner en sens inverse
à ses voisines.
Qu'y a-t-il de paradoxal dans une allée tourbillonnaire ?
L'ensemble de cette
organisation a la forme de spirales qui sont coupées l'une de l'autre,
et qui en même temps sont reliées l'une à l'autre pour
former une bande continue. C'est donc une dynamique qui, par un aspect,
est coupée d'étapes successives, et qui, par un autre aspect,
se présente comme ininterrompue.
Ce double caractère
doit bien être compris dans toute sa subtilité : bien que
chaque spirale forme une étape distincte nettement séparée
des autres, nulle part on ne trouve une frontière qui séparerait
d'un côté une spirale complète et de l'autre côté
une seconde spirale complète, car chaque spirale fait un peu partie
de la spirale qui la précède et fait aussi un peu partie
de la spirale qui la suit. Nous avons désigné par conséquent
cette situation comme relevant du paradoxe continu
/ coupé en étapes.
Nous sommes
entrés dans une nouvelle phase de la complexité
Maintenant, tentons
de décrire le type de classement obtenu entre les vitesses différentes
qui cohabitent dans la structure d'une allée tourbillonnaire : c'est
un classement en spirale qui se déplace en s'agrandissant, avec
des points singuliers de bifurcations à partir desquels la spirale
change de sens mais on est alors à un autre endroit de la nouvelle
spirale que l'endroit où l'on était dans l'ancienne, et d'ailleurs
la spirale se déforme au fur et à mesure qu'elle s'avance . . .
On a tenté
la description ! Et encore, on n'a décrit que la forme du classement.
Quant à décrire le mode d'évolution et d'imbrication
des vitesses dans cette structure complexe et mouvante, il n'en est pas
question. Comme il n'était plus question de décrire la suite
des positions occupées par une molécule après la fusion
de son réseau cristallin : son déplacement brownien était
tout autant impossible alors à décrire en termes d'une succession
de positions ponctuelles, que les vitesses internes au fluide sont maintenant
impossibles à décrire en termes de classements.
Il faut s'y habituer,
au début de chacune des quatre phases que comporte le cycle du noeud
nous devons changer notre regard, et chaque fois nous devons trouver un
autre élément significatif dont nous pourrons suivre l'évolution
pendant les quatre étapes de la nouvelle phase. D'abord, nous avons
examiné ce qu'il advenait aux positions ponctuelles, puis ce qu'il
advenait aux classements des vitesses, et maintenant ? Maintenant, ce sera
l'organisation. Nous allons observer la façon dont les différentes
parties du fluide s'organisent entre elles, c'est-à-dire la façon
dont elles forment des structures permanentes ou des structures fluctuantes,
des structures isolées l'une de l'autre ou des structures groupées
dans des structures de plus grande échelle, des structures indépendantes
ou des structures interdépendantes, etc.
À cette première
étape justement, comment pouvons nous décrire la nature de
l'organisation formée ? Nous pouvons tout simplement reprendre notre
description précédente:
- nous avons affaire
à des spirales dont la dynamique de chacune est bien séparée
de la dynamique de ses voisines, puisqu'elles tournent à l'envers
l'une de l'autre. Nous avons donc affaire à des organisations qui
sont coupées l'une de l'autre.
- mais en même
temps elles vivent en bande, et la bande qu'elles forment représente
une forme d'organisation d'ensemble continue.
Donc les spirales
sont, à ce stade, des dynamiques coupées l'une de l'autre,
et appartenant à une dynamique d'ensemble continue. Voilà
comment on peut résumer l'organisation du fluide, et comme on le
voit cette description reprend tout simplement les termes du paradoxe fondamental
de son fonctionnement "continu / coupé".
Une société
continue / coupée
Revenons à
la société occidentale que l'on envisage maintenant dans
les débuts du XXème siècle. Il n'est pas douteux qu'à
cette époque l'interdépendance des économies était
déjà prononcée, et que par conséquent la société
occidentale présentait bien un aspect de "dynamique d'ensemble".
Mais l'aspect de dynamiques coupées l'une de l'autre, était-il
lui aussi suffisamment marqué pour être remarquable ?
Le siècle précédent
fut celui du rangement par classes. Les prolétaires ne juraient
que par "prolétaires de tous les pays unissez-vous !". Dans la classe
la plus antagoniste, les capitalistes ne juraient pas tout haut de s'unir
entre tous les pays, mais ils y pensaient très fort, et ils le faisaient
chaque fois que nécessaire à leurs intérêts.
Cela est rappelé pour montrer combien d'autant plus significatif
fut le réveil des nationalismes au début de ce siècle.
À la grande stupeur et incompréhension des quelques socialistes
révolutionnaires qui vivaient encore sur les divisions du siècle
précédent, les prolétaires de chaque pays se sont
engagés massivement avec enthousiasme aux côtés de
leurs ennemis de classe, dans des guerres nationalistes qui promettaient
d'être courtes, fraîches et joyeuses, et qui sont devenues
rien de moins que la première guerre mondiale entre nations.
Il ne s'agit pas ici
de souligner l'existence de cette guerre. En elle même, elle n'a
rien de remarquable, et l'on aurait pu tout aussi bien parler en leur temps
de la guerre de cent ans du XVème siècle, des guerres de
religion du siècle suivant, etc., etc. Ce que l'on veut juste souligner,
c'est le réveil des nationalismes qui ont été cette
fois l'occasion de la guerre. Car cela confirme bien que la société
occidentale, au tournant du siècle, s'engageait dans un type d'organisation
qui mariait des dynamiques nationales qui voulaient se couper l'une de
l'autre, et la dynamique d'ensemble qu'apportait l'interdépendance
des économies nationales.
Traduction
dans l'art et la musique du paradoxe "continu / coupé"
Pour une raison que
nous expliquons ailleurs [ F
voir cette explication] ce n'est qu'à l'étape suivante
de l'évolution de la société que ce paradoxe sera
le paradoxe caractéristique de l'architecture. Du fait de la transformation
de plus en plus rapide de la société, ce fonctionnement commence
à s'installer avant même que le précédent n'ait
eu le temps de se généraliser, de telle sorte que les artistes
qui correspondent à des étapes successives de la complexité
se retrouvent en fait parfaitement contemporains. Pour cette raison pendant
plusieurs étapes nous aurons affaire à des artistes qui sont
habituellement classés ensemble dans le "mouvement moderne", ce
qui était déjà le cas lors de la dernière étape.
è
architecture deux exemples d'architectures
qui fonctionnent en continu / coupé :
Eero Saarinen : terminal TWA à New York Idlewild
Mies Van der Rohe : la Villa Tugendhat à Brünn
è
musique les expressions
caractéristiques de cet effet
Et l'architecture
de la société qui fonctionne de façon "continue /
coupée" ?
Comme indiqué
au début du paragraphe précédent, le paradoxe en jeu
dans l'architecture d'une époque est toujours en retard d'une étape
sur l'évolution des paradoxes en jeu dans la dynamique même
de la société.
La dynamique précédente
de la société était fondée sur le paradoxe
"synchronisé / incommensurable", c'est donc ce paradoxe qui fonctionne
dans l'architecture des architectes qui vivent dans une société
qui fonctionne de façon "continue / coupée".
On peut :
è
aller voir l'explication de la cause de cette situation paradoxale "synchronisée
/ incommensurable"
è
voir directement des exemples de l'architecture "synchronisée /
incommensurable"
qui forme ce que nous appellerons par commodité l'Art Moderne -1-
(Wright : une "maison dans la prairie"
et Aalto : Maison de la Laponie à Rovaniemi )
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