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Une société une / multiple
Aux étapes précédentes, de même que des tourbillons de fluide se gonflent, s’isolent,
puis s’associent en emboîtements hiérarchisés, nous avons évoqué la façon dont les nations se sont cristallisées, puis
ont gonflé pour le meilleur et pour le pire des nationalismes, puis enfin, la façon dont elles ont commencé à s’associer et à collaborer
sur un niveau international de plus en plus élevé.
Le stade maximum de cette évolution est évidemment celui où les sociétés de la terre
entière commencent à réagir comme un seul et même corps économique et social, même si ce corps n’est pas unifié et qu’il est
encore bourré d’antagonismes nationaux virulents. L’économie mondialisée, cela apparaît vraiment et se repère, paradoxalement, lorsqu’elle
commence à fonctionner de façon divisée, et même de plus en plus divisée, c’est-à-dire lorsque la spécialisation du travail
est devenue un fait qui vaut désormais à l’échelle mondiale.
La spécialisation, du moins son visage moderne, a commencé par une forte parcellisation du travail sur les
chaînes de production, ce qu'on a appelé taylorisme. À la suite de cette nouvelle organisation du travail, qui s’est progressivement
généralisée à de nombreux secteurs de production de par le monde, la compétition entre économies est alors devenue si vive que
le savoir-faire s'est spécialisé par pays entiers. Ainsi, après la 2e guerre mondiale, le Japon s'est spécialisé dans les
composants électroniques et dans les appareils de radio et de télévision, au point que bon nombre de pays n’ont plus cherché à fabriquer
de tels produits. De la même façon, à la même époque, certains pays n’ont pas cherché à fabriquer des automobiles, se contentant
de s’approvisionner auprès des pays qui s’y étaient spécialisés, et se concentrant, pour leur part, sur d’autres secteurs d’activité.
L’unification de plus en plus évidente des marchés mondiaux et la division de plus en plus forte du travail
ont donc grandi simultanément, mais un processus similaire s’est produit dans la façon de penser et d’organiser le savoir.
La science et la méthode scientifique ont, en effet, progressivement donné l’occasion d’une unification
des savoirs et donné le moyen de les faire partager et progresser en cohérence sur la terre entière, quelles que soient les civilisations
impliquées et leurs différences de croyances et d’habitudes de pensée. Mais la croissance exponentielle des connaissances, tout autant que l’aspect
académique qu’a dû revêtir la méthode scientifique pour garder sa cohérence, ont simultanément généré la
parcellisation des sciences et des savoirs, chaque discipline se refermant de plus en plus jalousement sur sa spécificité, sur ses méthodes, sur ses enjeux.
Le savoir est devenu global, unifié dans sa méthode générale, mais personne aujourd’hui n’a
plus de vision entière et globale sur sa propre discipline, découpée en rondelles de plus en plus autonomes et de plus en plus étanches les unes pour les autres.
Dans l’économie mondiale comme dans le savoir, le stade de l’unification la plus globale commence donc par
se caractériser, simultanément, par son aspect contraire, celui de la division, celui de la parcellisation de plus en plus forte et de plus en plus systématique.
Traduction
dans l'art et la musique du paradoxe "un / multiple"
Pour une raison que
nous expliquons ailleurs [ F
voir cette explication] ce n'est qu'à l'étape suivante
de l'évolution de la société que ce paradoxe sera
le paradoxe caractéristique de l'architecture. Du fait de la transformation
de plus en plus rapide de la société, ce fonctionnement commence
à s'installer avant même que le précédent n'ait
eu le temps de se généraliser, de telle sorte que les artistes
qui correspondent à des étapes successives de la complexité
se retrouvent en fait parfaitement contemporains. Il n'est donc pas possible
de repérer une période précise dans l'art et la musique
relevant du fonctionnement de ce paradoxe, et nous devons trier parmi les
contemporains ceux qui en relèvent.
è
architecture deux exemples d'architectures
qui fonctionnent en un / multiple :
Tschumi : le parc de la Villette à Paris
Libeskind : le Musée juif de Berlin
è
musique les expressions
caractéristiques de cet effet
Et l'architecture
de la société qui fonctionne de façon "une / multiple"
?
Comme indiqué
au début du paragraphe précédent, le paradoxe en jeu
dans l'architecture d'une époque est toujours en retard d'une étape
sur l'évolution des paradoxes en jeu dans la dynamique même
de la société.
La dynamique précédente
de la société était fondée sur le paradoxe
"intérieur / extérieur", c'est donc ce paradoxe qui fonctionne
dans l'architecture des architectes qui vivent dans une société
qui fonctionne de façon "une / multiple".
On peut :
è
aller voir l'explication de la cause de cette situation paradoxale "intérieure
/ extérieure"
è
voir directement des exemples de l'architecture "intérieure / extérieure"
(Christo & Jeanne-Claude : le Reichstag Empaqueté à Berlin
et Boffil : église de Meritxell)
dernière mise à jour de ce texte : 30 août 2007
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