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le style maniériste |
Dans un autre texte on a pris pour
point de départ un réseau cristallin d'atomes entourés
d'atomes semblables [
revoir l'image caractéristique dans une autre fenêtre].
Dans un autre texte encore on a
expliqué que ce type de situation d'empilement, les unes contre les autres, d'unités semblables, pouvait être considéré
non seulement au départ mais aussi au bouclage final d'un cycle
complet de 16 étapes de complexification progressive du mouvement.
Le voyage dans la société occidentale depuis la Renaissance
nous amène donc à l'époque contemporaine sur une situation
qui présente des similitudes avec celle de la Renaissance, sauf
que l'on a changé d'échelle, et que c'est maintenant la situation
de l'humanité dans sa globalité qu'il faut considérer
et non plus seulement la société italienne du XVème
siècle. En effet, on peut maintenant considérer que l'atome à la fois isolé et pris dans
un réseau qui le relie à ses semblables a pour équivalent l'internaute isolé dernière son ordinateur
et connecté au "réseau des réseaux", ou bien la personne qui se branche aux autres par son téléphone cellulaire portatif
que des satellites qui tissent leur toile tout autour du globe raccordent instantanément à l'ensemble de la planète.
On a vu, dans le texte rappelé plus haut, que le caractère paradoxal d’un réseau d’atomes qui s'appuient tous les uns sur les autres est que de
chacun on peut dire qu'il est au centre des autres et qu'il fait simultanément partie de la périphérie des autres. Ce qui est au centre est donc en
même temps à la périphérie, et c'est pourquoi on a dit que cette situation relevait du paradoxe du "centre à la périphérie".
Nature du paradoxe que l'artiste cherche à maîtriser
L'artiste, comme tous les membres de sa société qui participent
à ce fonctionnement, est donc "pris", "englué" dans le paradoxe
du "centre à la périphérie".
Mais il est trop "pris", trop "englué" dans ce paradoxe pour
pouvoir le regarder en face. Il est "dépassé" par ce paradoxe
qui domine inconsciemment son comportement. Ce paradoxe est trop omniprésent
dans les rouages de sa société et à toutes les échelles
et sous tous les aspects de son fonctionnement, pour qu'il puisse l'appréhender
avec un quelconque recul. Il est lui même une partie de ce paradoxe,
puisque ce paradoxe est celui qui a trait à la relation entre la
société dans son entier et chaque membre de cette société.
À défaut de pouvoir y faire face, et dans le but de prendre
le recul qui lui manque pour saisir complètement ce qui se passe
en lui, il peut apprivoiser une forme moins virulente de ce paradoxe, une
forme que l'acquis de la société a déjà permis
d'intégrer à la complexité du fonctionnement interne
de chacun, une forme que pour cette raison il pourra dominer, dont il pourra
appréhender tous les aspects, saisir toutes les relations internes
impliquées par son fonctionnement. Cette forme atténuée
du paradoxe du "centre à la périphérie", on peut penser
que c'est le paradoxe "relié / détaché" puisque c'est
lui qui a dominé l'étape précédente
de l'évolution du fonctionnement de la société.
On explique maintenant pour quelle raison le recours à ce fonctionnement
paradoxal est effectivement impérieux pour une personne "prise"
dans le paradoxe du "centre à la périphérie" afin
de l'aider à tenir dans une telle situation.
Pertinence du paradoxe "relié / détaché"
Quand la société n’apparaît plus structurée par des pôles de repères dominants mais seulement formée d’un lacis
d’individualités semblables uniformément reliées les unes aux autres, il importe d’être capable de bien ressentir comment on peut
être à la fois complètement et de multiples façons relié aux autres, tout en conservant la notion que notre personnalité est
distinctement détachée des autres et qu’elle forme à elle seule un pôle bien autonome et bien indépendant des autres.
Les deux procédés du paradoxe "relié / détaché"
Comme à toute époque [
revoir l'explication dans une autre fenêtre], nous trouvons deux
procédés pour exprimer ce paradoxe : le procédé
analytique, et le procédé synthétique.
Ce procédé analytique consiste à faire en sorte
que l'architecture présente certains éléments complètement
reliés entre eux, tandis que d'autres éléments de
cette architecture se détachent au contraire très nettement,
faisant une brusque saillie qui les isole et les coupe de toute continuité
avec ce qui les environne. Ce procédé consiste donc à
réellement mettre en présence les termes contradictoires
du paradoxe, termes qui normalement s'excluent. Mais par sa réussite
même, ce procédé tue ce qu'il y a de vraiment paradoxal,
c'est-à-dire d'insoluble dans le paradoxe qu'il illustre.
Le procédé synthétique consiste, par des conflits
dans notre perception, à nous faire ressentir le trouble exact qui
s'installe en nous lorsque l'on cherche à percevoir que les espaces
ou les éléments de l'espace sont en même temps parfaitement
reliés entre eux et complètement détachés les
uns des autres. Ce procédé permet cette fois de garder vivante
l'impression d'impossible cohabitation des deux termes du paradoxe, mais
en échange il se doit d'être moins exigeant sur ce qu'il fait
réellement. Il garde vivante l'impression d'incompatibilité
entre le relié et le détaché, mais en revanche il
doit s'abstenir d'utiliser des éléments complètement
reliés opposés à des éléments complètement
isolés.
Le "relié / détaché" aux deux bouts du cycle du noeud
Nous aurions pû faire l'analyse d'architectures contemporaines
qui fonctionnent de façon "reliée /détachée",
mais nous avons préféré analyser des exemples de l'architecture
Renaissance qui relève du même fonctionnement à l'autre
extrémité du cycle du noeud. Signalons cependant que le "relié
/détaché" contemporain et le "relié /détaché"
de la Renaissance ne sont pas identiques, cela pour deux raisons :
- les trois paradoxes combinés avec ce paradoxe dominant ne
sont pas les mêmes. Dans l'architecture Renaissance, ce sont les paradoxes
du "centre à la périphérie", de "l'entraîné
/ retenu" et du "mouvement d'ensemble / autonomie". Dans l'architecture
contemporaine ce sont les paradoxes du "un / multiple", du "regroupement
réussi / raté" et du "fait / défait".
- en supplément à cette combinaison de trois paradoxes dit "d'état" [
présentation de cette notion dans une autre fenêtre]
pour faire du relié / détaché, il existe les paradoxes dit de "transformation" [
présentation de cette notion dans une autre fenêtre] qui se renouvellent à toutes
les étapes. Pour des raisons de simplification, ces paradoxes ne sont pas envisagés dans les analyses suivantes, mais il importe au moins
de savoir que ces paradoxes ne sont pas du tout analogues à l'étape de la Renaissance et à l'étape contemporaine, de telle sorte que la
période contemportaine ne peut certainement pas être envisagée que comme un simple retour à la période de la Renaissance.
La façade du Palais Pitti à Florence
vue de la partie centrale initiale de la façade (dans une autre fenêtre)
On ne sait trop quel architecte a conçu le palais Pitti de Florence,
dans la seconde moitié du XVème siècle. Certains ont
évoqué le nom de Brunelleschi, à d'autres cela semble
très douteux. Peu importe.
Au départ, la façade ne comportait en largeur que sept
fenêtres. Un siècle plus tard, l'architecte Bartolomeo Ammannati
l'a fortement allongée à la demande de Cosme 1er. Aujourd'hui,
dans des circonstances équivalentes, un architecte s'acharnerait
à faire une extension qui se démarque le plus possible du
style initial pour affirmer à la face du monde l'originalité
de sa personnalité. À cette époque ce genre d'attitude
n'était pas de mise, et Ammannati prolongea la façade dans
le style exact où les premières travées avaient été
construites un siècle plus tôt.
C'est ce style initial que nous allons interroger, qui consiste à
souligner le découpage de chaque pierre en creusant un joint profond
sur toute la périmétrie de son contour.
Les joints forment un réseau qui relie toutes les pierres de
la surface de la façade et en même temps les coupe complètement
l'une de l'autre. Les pierres sont toutes reliées mais aussi toutes
détachées les unes des autres, toutes complètement
détachées parce que toutes complètement reliées.
Il s'agit d'une expression analytique du paradoxe, car le lien généralisé
est réellement présent de même que la coupure complète.
Ce mode d'expression qui réalise réellement les deux termes
contradictoires du paradoxe tue effectivement ce que leur confrontation
a de véritablement paradoxal, puisque le fait de relier les pierres
de cette façon les détache inévitablement l'une de
l'autre : si la conséquence est logique, elle ne peut être
paradoxale.
Filippo Brunelleschi vécut de 1377 à 1466. Il est la première
grande figure d'architecte de la Renaissance. Il doit une grande part de
sa renommée, d'avoir réussi à couvrir d'une coupole
l'énorme tambour qui surmonte le coeur de la Cathédrale de
Florence. Les florentins lui doivent ainsi la face sauve, car beaucoup
craignaient que le tambour ne fut trop grand pour recevoir une couverture
qui ne s'effondre. Brunelleschi trouva la solution.
Si l'attribution à Brunelleschi du Palais Pitti est douteuse,
certaine en revanche est celle de l'église de Santo Spirito qu'il
construisit à Florence en 1436.
Les chapiteaux de la nef de San Spirito sont curieux. Ils sont décomposés
en plusieurs parties qui se superposent, nettement séparées
les unes des autres.
La partie inférieure est un chapiteau corinthien, qui est la
part que Brunelleschi emprunte à l'antiquité Gréco-Romaine.
S'appuyant sur ce témoignage du passé, le dessus est la part
d'invention de Brunelleschi. Ce dessus commence par une succession de ressauts
en reliefs les uns sur les autres, brusquement cette succession s'arrête,
puis plus haut, après une très grande coupure et alors qu'on
pouvait le croire fini, le chapiteau reprend par un nouveau ressaut, plus
prononcé encore que les précédents.
Le tailloir isolé qui se forme ainsi est perçu comme
un élément autonome, un élément détaché
du chapiteau et encastré dans les arcs du dessus. Mais en même
temps il est perçu comme tout à fait intégré
au chapiteau, puisqu'il participe à la suite des débords
successifs qui s'enchaînent depuis le bas.
Ressaut complètement détaché des autres, en même
temps que ressaut visuellement relié à ceux du dessous dont
il poursuit la cascade des débords, voilà une expression
analytique du paradoxe relié / détaché. Analytique,
parce que chacun des deux aspects paradoxaux se sert d'un effet visuel
différent pour s'affirmer.
Autres artistes de la
Renaissance qui font du relié / détaché
On peut citer par exemple :
- Léon Battista Alberti (1404 - 1472), auteur notamment du Palais
Rucellai à Florence
- Luciano Laurana (vers 1420/1425 - 1479), auteur notamment du Palais
ducal d'Urbino
- Lorenzo Ghiberti (1378 -1455) qui sculpta la Porte du Paradis du
baptistère de Florence
Travaux pratiques
Dans un autre texte il est
expliqué que, au cycle du noeud qui fonctionne en organisation,
chaque paradoxe dominant utilise trois autres paradoxes dominés
qu'il combine pour se faire valoir.
Il peut être un bon exercice d'entraînement de rechercher
comment le paradoxe dominant "relié / détaché" utilise
dans les exemples que l'on a donné les paradoxes :
le centre à la périphérie (que l'on trouve dans le
style maniériste)
entraîné / retenu (que l'on trouve dans le style baroque et
dans le style classique)
mouvement d'ensemble / autonomie (que l'on trouve dans le style rococo)
Pour être complet, il convient de rechercher chaque fois l'expression analytique et l'expression synthétique de chacun de ces paradoxes.
dernière mise à jour de cette page : 21 octobre 2007
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