Quelques questions
juridiques sur la photoscopie
   
    Vos questions (un peu transformées) et mes réponses sur des questions générales touchant à la photoscopie.    
   
date question réponse
28/05/2007 Je m'apprête à publier un livre de photo sur le cimetière du Père-Lachaise, j'ai entendu dire qu'il y avait des démarches à faire pour la publication par rapport aux ayant droits.

Merci de m'éclairer.
Là, je sais répondre, entre autre grâce aux démarches de l'association des Amis et Passionnés du Père Lachaise mais aussi par la lecture de plusieurs jurisprudences du droit à l'image et aussi du droit d'auteur.

Ma réponse n'est pas fiable à 100%, mais ça devrait déjà éclairer votre lanterne..

En France, on a le droit de ne rien faire, sauf chez soi du moment qu'on ne le montre à personne et que ça ne fait ni bruit ni odeur, surtout depuis Sarkozy.

En fait, on n'a pas le droit de faire des photos dans un cimetière parce qu'il s'agit d'un lieu public géré par la Mairie de Paris, donc propriété de cette dernière avant d'être propriété des contribuables.
Mais comme le droit ne dépend en général que des moyens de l'appliquer, aucun gardien n'accepterait d'être payé aussi peu pour faire la chasse à chaque appareil photo dans la poche de chaque touriste qui flâne au Père-Lachaise. Mais on est tous effectivement hors la loi sur ce premier point.

Ensuite il y a une petite subtilité, chaque concession, c'est à dire chaque tombe plate en marbre en plus ou moins bon état est la propriété de ... la famille du défunt ! C'est une propriété privée.
Il est donc totalement impossible de photographier (à cause du réglement intérieur du cimetière public qui n'autorise aucune photographie, allée, arbre ou tombe) mais surtout de publier une photo de la tombe en question (vous pouvez toujours photographier une maison dans la rue, mais en aucun cas publier la photo sans l'autorisation du propriétaire ou de l'architecte).

Cerise sur le gâteau, si il existe une statue, horrible ou belle sur la tombe, et que l'on en prend un cliché, c'est à une triple interdiction que l'on s'attaque, la première déjà citée, la deuxième déjà citée, et une troisième interdiction de publier une photo parce que la statue est une œuvre de l'esprit (notion franco française du droit d'auteur poussée à l'extrême) qui appartient à son auteur avant d'appartenir à son commanditaire (la famille du défunt ou le défunt lui même avant sa mort) et surtout (si l'artiste est mort) pendant au moins 70 ans à ses ayants droits (les enfants généralement mais n'importe qui qui s'en réclame comme son conjoint vivant par exemple).

Donc, en résumé, dans un cimetière parisien de la Mairie de Paris, il est trois fois impossible de publier des photos de statues, et au moins une fois impossible de prendre la photo. Je ne sais même pas comment vous n'êtes pas en train de croupir dans un cachot, et moi avec.

Toutes les personnes que je connais qui ont demandé une autorisation à la direction du cimetière ne l'ont jamais obtenue. Quand à demander les autorisations à chaque famille, puis à chaque ayant droit des artistes des statues ou mosaïques sur une sépulture, sans parler de contre parties financières, il est inutile de préciser que l'on pourrait y passer 4 ans avec simplement une vingtaine de photos.

Tout ça, c'est la théorie.
Dans les faits, tout le monde s'en fiche éperduement, tout le monde s'étant exonéré des responsabilités réciproques par les réglements ou par la jurisprudence.
Le seul qui devra payer si quelqu'un veut faire valoir ses "droits" inaliénables, c'est le photographe qui aura tout perdu car à moins d'être très bon procédurier, il aura tort quoi qu'il arrive.

Si l'on est un peu attentif, on s'aperçoit que les livres sérieux sur le Père-Lachaise ne montrent que des vues d'ensemble ou des vues de sépultures passées dans le domaine public. Soit qu'elles soient achetées par l'état, soit que tous les ayants droits soient morts et qu'aucune poursuite ne soit envisageable.
Avec une petite autorisation à postériori de la direction des cimetières parisiens pour faire joli et juridiquement correct.
Quand aux tombes plus récentes, on peut compter sur un risque de la maison d'édition ou un sacré travail de contact avec les familles pour obtenir un papier qui dédouane l'éditeur pour cette parution (mais pas le photographe à mon avis personnel).

Au niveau juridique, les avocats ayant pour vocation de gagner de l'argent, une famille qui ferait un procès pour publication d'une photo de tombe accessible à tous sur le domaine ouvert au public ne serait pas très bien accueillie par le juge. La plainte sera sans doute recevable, mais le ridicule de demander des dommages et intérêts pour un cadavre recouvert de marbre semble suffisament explicite pour que le photographe ou l'éditeur s'en tire sans trop de dommage s'il joue le jeu de la bonne foi. Mais ce sera beaucoup de temps et d'argent gaspillé pour pas grand chose, surtout si on multiplie le risque par le nombre de photo de tombe différente sur un livre entier.

Attention, tout cela ne concerne qu'un Français qui éditerait un livre français imprimé en France avec un photographe Français. Les lois sur la propriété intellectuelle et artistique n'ayant aucun équivalent dans les autres pays, notamment les Etats Unis, un photographe américain qui publierait un livre avec un éditeur Tunisien et un imprimeur Suisse (plutôt le contraire d'ailleurs) avec des textes en Français prendrait beaucoup moins de risques, les droits d'auteurs n'existant pas de la même manière dans ces pays respectifs.

Mais pour le Français Lambda qui prendrait une photo d'une tombe du Père-Lachaise et la publierait dans un livre édité et imprimé en France, le risque est énorme. Il peut passer par une amende et un procès impressionnant selon l'avidité des ayants-droits, la cessation immédiate de la publication et de la vente du livre sous astreinte d'une autre amende par exemplaire publié (en cours de vente, ce n'est heureusement pas rétro-actifs sur les exemplaires déjà vendus).
La Mairie de Paris n'attaquera elle que si les photos en question remettent en cause la moralité ou le positionnement marketing du lieu. On peut imaginer qu'une galerie de photos uniquement centrée sur les fesses et les seins des belles femmes en pierre du cimetière iraient titiller le côté sérieux et austère d'un lieu de mort. Et pour celà, des conseillers juridiques pourraient conseiller Delannoë d'attaquer l'auteur du livre, il s'agit là de la nuit noire. Et comme le photographe sera sûrement insolvable, ce sera la maison d'édition qui prendra l'attaque en pleine figure.

Depuis tout à l'heure, je ne parle que des possibilités d'ennuis. J'ai tenu ce site (eternelles.net) depuis bientôt 9 ans et je n'ai aucun problème pour l'instant. Mais je ne suis pas dupe, tout peut m'arriver si un imbécile heureux près de ses soux décide de demander le respect du droit de propriété intellectuelle sur une statue présente sur mon site, puisqu'il s'agit bien de publication, même non lucrative.
J'ai pensé à une époque l'héberger aux Etats Unis ou en Russie, mais le problème, c'est que la justice juge l'esprit de la loi et non les tenants exacts de la loi, et la mauvaise foi d'un photographe qui héberge son site ailleurs que dans son pays est déjà une preuve d'un manquement à ses obligations et une preuve d'une volonté manifeste de se soustraire aux lois de son pays qu'il n'est pas censé ignorer selon la formule consacrée. Ce genre de manœuvre ne fonctionne qu'avec le meilleur avocat de la place de Paris, et je n'en ai pas du tout les moyens. Donc, plutôt que de jouer au chat et à la souris, j'ai préféré rester au niveau basique du site amateur à but non lucratif sans tour de passe passe.
Quitte à le stopper tout net si une seule mauvaise nouvelle venait à arriver.

Pour un livre, c'est encore plus précis, puisque le but lucratif est avéré, et les appétits des ayants-droits d'autant plus aiguisés.

Rien de drôle sous le soleil de France, c'est le pays le plus tatillon sur ces sujets.
Tant mieux pour les artistes. (Sauf que je ne supporte pas l'idée que les ayants-droits aient les mêmes droits que leurs talentueux géniteurs !).
Tant mieux pour les cimetières, qui seraient envahis de photographes sur tous les sujets, même les moins reluisants.
Tant pis pour les photographes qui sont de plus en plus les artistes mal-aimés du droit Français.

En espérant avoir répondu à toutes vos questions, tout en précisant bien que j'ai parlé des cas extrèmes, dans 99% des cas, il n'y aura aucun problème. Reste que le 1% peut amener des situations très désagréables.

En cas de publication et de demande aux familles, il faut surtout trouver dans des livres ou auprès d'un juriste le formulaire juridiquement valable d'une autorisation de publication. Il y a notamment un point critique : on doit formuler exactement le nombre de photos publiées, pour le nombre exact de publication (un ou plusieurs livres différents) et la rémunération éventuelle aux ayant droits (ou la gratuité qu'il vaut mieux préciser) ainsi que la durée maximale de publication dans le temps.
C'est à ce prix que les ayants droits ne pourront se retourner contre le photographe honnête, ou plus exactement que les honnêtes gens sous le coup d'un contrôle fiscal inopiné n'auront pas la tentation d'être moralement malhonnête en vous demandant 5 ans après des dédommagements !.


A la prochaine.

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