Enrichissement Enantiomérique par Solubilisation ou Sublimation Partielle
Jean-Claude Guillemin
É cole Nationale Supérieure de Chimie de Rennes, CNRS, UMR 6226, Avenue du Général Leclerc, CS 50837, 35708 Rennes Cedex 7

La plupart des briques du vivant que sont les acides aminés et les sucres possèdent un centre de chiralité. Cependant, un seul des deux énantiomères possibles est présent dans les molécules du vivant. Toutefois en chimie abiotique et en absence d’un composé chiral présent en excès, la chimie des molécules prochirales conduit toujours à un mélange équimolaire des énantiomères. Depuis presque deux siècles, la question de l’origine de l’homochiralité terrestre a conduit à échafauder de multiples théories et à développer de multiples études sur l’origine de l’excès énantiomérique. L’enrichissement énantiomérique de mélanges initiaux faiblement enrichis a connu récemment des développements importants. Les travaux de Blackmond (1) permettent de montrer comment une solubilisation partielle
d’un mélange initialement faiblement enrichi peut conduire à une solution ne contenant pratiquement que l’un des énantiomères alors que le racémique est essentiellement en phase solide. La chimie s’effectuant dans la phase liquide peut donc devenir dépendante de la présence d’un seul énantiomère. La sublimation d’un composé chiral énantiomériquement enrichi s’est aussi avérée plus complexe qu’il n’avait été proposé au début des années 80 où toute sublimation devait
conduire à la formation en phase gazeuse du mélange eutectique indépendamment de la composition et de la nature du mélange initial (2). Des travaux récents ont montré que soit dans des conditions de sublimation très loin de l’équilibre (3) mais aussi dans des conditions douces de sublimation très lente (4), des résultats différents pouvaient être obtenus pour un même composé avec le même excès énantiomérique initial en fonction de la nature du mélange initial. Une partie importante de ces travaux a été réalisée sur des acides aminés, constituants du vivant.

En solution comme en phase gazeuse, le concept de « conglomérat cinétique » ouvre de nombreuses possibilités en chimie prébiotique.

Références
1 M. Klussmann, H. Iwamura, S. P. Mathew, D. H. Wells, Jr., U. Pandya, A. Armstrong, D. and G. Blackmond, Nature, 2006, 441, 621-622. M. Klussmann, T. Izumi, A. J. P. White, A. Armstrong and D. G. Blackmond, J. Am. Chem. Soc. 2007, 129, 7657-7660. M. Klussmann, S. P. Mathew, H. Iwamura, D. H. Wells, A. Armstrong and D. G. Blackmond, Angew. Chem., Int. Ed. 2006, 45, 7989-7992.
2. D. L. Garin, D. J. C. Greco and L. Kelley, J. Org. Chem. 1977, 42, 1249-1251. J. Jacques, A. Collet and S. H. Wilen, “Enantiomers, racemates, and resolutions” John Wiley & Sons, 1981, New York, Chichester, Brisbane, Toronto, pp. 163-165.
3 V. A. Soloshonok, H. Ueki, M. Yasumoto, S. Mekala, J. S. Hirschi and D. A. Singleton, J. Am. Chem. Soc. 2007, 129, 12112-12113. M. Yasumoto, H. Ueki, V. A. Soloshonok J. Fluorine Chem. 2010, 131, 540-544. M. Yasumoto, H. Ueki, T. Ono, T. Katagiri, V. A. Soloshonok J. Fluorine Chem. 2010, 131, 535-539.
4. Bellec, A. ; Guillemin, J.-C. Chem. Commun., 2010, 46, 1482-1484. Bellec, A. ; Guillemin, J.-C. J. Fluorine Chemistry, 2010, 131, 545–548.

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