I. Récapitulatif des Conséquences
Générales des Conservateurs: Allergies et Cytotoxicité:
Les conséquences de conservateurs dans les
collyres ont été rapportés depuis 1941. Cependant, nous devons
reconnaître que peu a changé depuis. Néanmoins, il existe des preuves
croissantes et abondantes que les conservateurs ont des effets négatifs
voire même des conséquences sévères sur les thérapies oculaires.
Le Benzalkonium, par exemple, est un
ammonium quaternaire utilisé comme détergent, antiseptique,
désinfectant, fongicide, bactéricide et spermicide. Vous pouvez alors
facilement imaginer que son utilisation sur la surface oculaire doit
avoir quelques conséquences! Toutefois, le Benzalkonium est l'un des
conservateurs les plus utilisés dans les collyres actuels. L'une de ses
premières conséquences est la dissolution du film lacrymal (ou la
dislocation des composants des larmes). L'explication est pourtant
simple puisque tous les détergents surfactants sont capables de
dissoudre les lipides (et ceux contenus dans les larmes ne font pas
exception!). Ainsi, même un film lacrymal sain contenant un couche
lipidique adéquate sera altérée par la présence d'un tel détergent.
Cette décomposition du film lacrymal peut conduire à une sécheresse
en augmentant l'évaporation et l'inflammation voire les dommages sur la
surface oculaire. Mais le benzalkonium a bien d'autres
conséquences dont l'allergie, la cytotoxicité et
des accumulations dans les tissus de l'oeil. Le Benzalkonium
modifie les protéines de l'oeil et peut provoquer 2 types de
réactions immunitaires: allergie et cytotoxicité.
En effet, de nombreuses études démontrent que le Benzalkonium provoque
l'apoptose (ou la mort cellulaire) épithéliale.
Ce faisant le Benzalkonium réduit la cicatrisation
cornéenne. Nous avons également des preuves selon lesquelles le
benzalkonium pénètre l'oeil et est emmagasiné dans
divers tissus oculaires (notamment la conjonctive, la cornée,
l'iris, la rétine, le cristallin, l'humeur aqueuse, la choroïde, etc.)
[1] D'autres études suggèrent même que le benzalkonium peut causer des
cataractes voire changer la couleur de l'iris en lui créant de tâches
brunâtres. Certains auteurs concluent que "les gouttes conservés avec du benzalkonium à des concentrations supérieures à 0.005 doivent être
abandonnées dans les thérapies cliniques"[6]. Vu que la plupart des
gouttes utilisent ce conservateur à des dosages supérieurs et qu'avec de
telles doses de conservateur la stérilité ne peut être assurée, l'on
peut alors conclure que c'est l'usage de benzalkonium qu'il faut
totalement éradiquer. De plus, une étude conclut qu'après le retrait du
BAK, "l'amélioration est proportionnelle à la durée de la thérapie
antérieure contenant du BAK"[8] .
Ces substances sont un danger pour la biologie de la cornée!
Mais le benzalkonium n'est qu'un des
conservateurs les plus utilisés et la plupart des commentaires sont
applicables aux ammoniums quaternaires à différents degrés.
Les Ammoniums quaternaires sont
certainement parmi les conservateurs les plus toxiques actuellement
utilisés, mais la plupart des études démontrent que tous les
conservateurs actuels exercent une certaine toxicité. Il y a donc des
conservateurs meilleurs que d'autres mais peut-être serait-il plutôt
approprié de dire que certains conservateurs sont moins mauvais que
d'autres. Certains conservateurs ne sont plus vraiment utilisés car ils
étaient trop allergènes (c'est le cas du thiomersal ou thimerosal qui
est désormais peu utilisé). Certains nouveaux conservateurs prétendent
être mais agressifs que les anciens et particulièrement lorsqu'ils sont
comparés au benzalkonium (c'est le cas de Purite®, GenAqua® et divers
types de polyquarterniums incluant le Polyquad®) [5].
La plupart des études montrent en effet qu'ils sont moins abrasifs et
toxiques que le benzalkonium, ce qui ne veut pas dire qu'il ne sont pas
du tout toxiques ou agressifs pour l'oeil humain. D'après les dernières
études, les moins nocifs sont les conservateurs oxydatifs comme Purite®
et GenAqua®. Il existe néanmoins peu
d'études indépendantes pour soutenir ces affirmations. Il serait sage de
comparer tous les conservateurs entre eux et tous ceux-là à une solution
saline voire à la même substance active avec et sans conservateur. Il
serait aussi fondamental de considérer que les études sont faites sur
les yeux sains tandis que les collyres sont faits pour des yeux malades
(ainsi l'exigence devrait être plus grande). Ainsi, un conservateur
considéré comme sûr sur une cornée normale pourrait ne pas l'être sur
une cornée malade ou des yeux secs. "L'élimination des
conservateurs est désirable pour protéger l'intégrité de la surface
cornéenne et son interaction avec le film lacrymal"[7].
Ainsi, laboratoires et agences
gouvernementales oculaires du monde entier, si vous nous écoutez,
veuillez effectuer des études comparatives indépendantes pour déterminer
l'innocuité de ces substances. Certaines substances sont vendues comme
étant des irritants oculaires par leurs fabricants. Il est alors curieux
que leur utilisation soit considérée comme neutre dès lors qu'elle
sont destinées à des collyres pour des yeux malades!
Plus généralement, d'après l'Association
d'Optométrie Américaine [2] "Les conservateurs (et leurs effets
potentiels adverses) utilisés dans les substituts lacrymaux, sont:
-
Thimerosal -- hypersensibilité dans 10 à 25
% des utilisateurs
-
Chlorure de Benzalkonium -- Instabilité du
film lacrymal, réduction du temps de rupture du film lacrymal,
désorganisation des fonctions cellulaires épithéliales lorsqu'il est
utilisé à des doses commerciales
-
Chlorobutanol -- évaporation, modification
des cellules épithéliales
-
Acide Ethylenediaminetetraacetique (EDTA) --
allergie de contact
-
Digluconate de Chlorhexidine -- accumulation
dans l'épithélium cornéen et conjonctival"
II. Des Gouttes Moins Efficaces, une Diminution
de la Tolérance et du Respect de la Prescription Médicale
Un autre aspect intéressant, qui a été
abordé par quelques rares études à ce jour, c'est le fait que les
conservateurs peuvent réduire l'efficacité des traitements
particulièrement quand des processus inflammatoires sont impliqués dans
la maladie [3] ou quand les effets abrasifs des conservateurs sont une
contre-indication sérieuse pour la maladie oculaire. Par exemple, les
collyres antihistaminiques seront probablement moins efficaces car
l'inflammation va accroître l'allergie. Au delà de cela, les collyres
qui irritent et piquent moins les yeux vont permettre plus facilement au
patient de tolérer les gouttes et de ce fait mieux respecter la
prescription médicale. En présence des conservateurs c'est tout
l'inverse qui se passe(4). Ainsi, c'est dans l'intérêt de l'industrie
pharmaceutique que de s'intéresser à cette question... le plus vite
possible.
Ainsi, une étude prospective, ouverte, non randomisée, portant sur 3 090 patients inclus par 507 médecins généralistes de toutes les régions
de France a étudié la survenue d'effets indésirables des collyres
anti-histaminiques en version conservée (essentiellement le
benzalkonium) et non conversée. La proportion de patients présentant un
effet désirable était respectivement de 89% et 24% (le plus souvent il
s'agissait de brûlures et picotements). L’observance avec des collyres anti-allergiques sans conservateur était significativement supérieure à celle des collyres avec conservateur.
Cette étude conclue de la façon suivante "La prescription de collyre sans conservateur permet une réduction significative des effets indésirables oculaires et une meilleure adhésion du patient à son médicament anti-allergique"[9].
Lire la suite sur les
conséquences analysées
par
Conservateur
Etudes (certaines sont disponibles sur
Pubmed) ayant servi de référence pour cet article:
1: Les Conservateurs en
Ophtalmologie, Docteur Patrice Vo Tan, Docteur Yves Lachkar, Librairie
Médicale Théa, 64 pages.
2: American
Optometric Association. Care of the patient with ocular surface
disorders. St. Louis (MO): American Optometric Association.
3:
Comparative study of topical anti-allergic eye drops on human
conjunctiva-derived cells: responses to histamine and IFN
gamma and toxicological profiles
Pauly A,
Brignole-Baudouin
F,
Guenoun JM,
Riancho L,
Rat P,
Warnet JM,
Baudouin C.
U598, INSERM, Cordeliers Biomedical Institute, 15 rue de l'ecole de
medecine, 75006, Paris, France. CONCLUSIONS: The
ability of topical ocular anti-H(1) drugs to significantly reduce the
production of IL-6 and IL-8 argues that they may help treat the
inflammatory processes occurring in allergic ocular surface disorders.
Nevertheless, preserved ophthalmic formulations may enhance epithelial
conjunctival expression of ICAM-1 in the presence of a low inflammatory
stimulus, such as IFNgamma, and displayed toxic as well as pro-oxidative
effects on these cells. Therefore, BAC used as preservative might in
part interfere with the potential anti-inflammatory properties of the
active compound by modulating the immuno-inflammatory response of
epithelial conjunctival cells. To
display study click here
4: A
comparative study of the ocular tolerance after administration of
anti-allergic eye drops with or without a preservative. [Article in
French] ,
Beden C, Helleboid L, Marmouz F, Liard F. Societe Naxis, Lyon, France.
CONCLUSION: The prescription of eye drops with no preservative allows a
significant decrease in ocular adverse drug reactions and a greater
acceptance by the patient regarding his/her anti-allergic treatment.
5: Comparison of
toxicological profiles of benzalkonium chloride and polyquaternium-1: an
experimental study. Labbe A, Pauly A, Liang H,
Brignole-Baudouin F, Martin C, Warnet JM,
Baudouin C. Department of Ophthalmology III, Quinze-Vingts National
Ophthalmology Hospital, and INSERM U598, Cordeliers Biomedical
Institute, University of Paris 5, Paris, France.
PMID: 16910868,
J Ocul Pharmacol Ther. 2006 Aug;22(4):267-78
[PubMed - indexed for MEDLINE]
6:
How the most common preservative affects the
Meibomian lipid layer, Kaercher T.; Hönig
D.; Barth W., Orbit, Volume 18, Number 2, June
1999, pp. 89-97(9), Taylor & Francis Ltd.
7.
Comparison
of the short-term effects on the human corneal surface of topical
timolol maleate with and without benzalkonium chloride.
Ishibashi T, Yokoi N, Kinoshita S, Department of Ophthalmology,
Kyoto Prefectural University of medicine, Kyoto, Japan,
J Glaucoma,
2003 Dec;12(6):486-90.
PMID: 14646684 [PubMed - indexed for MEDLINE]
8.
Topical timolol
with and without benzalkonium chloride: epithelial permeability and
autofluorescence of the cornea in glaucoma. de Jong C,
Stolwijk, Kuppens, de Keizer R, van Best J, Department of
Ophthalmology, Leiden University Hospital, The Netherlands.
PMID: 8034210 [PubMed - indexed for MEDLINE].
9.
Etude comparative de la survenue d’effets indésirables suite à l’administration
de collyres anti-allergiques sans ou avec conservateur: A Comparative
Study of the Ocular Tolerance After Administration of Anti-Allergic Eye
Drops With or Without a Preservative, Beden, Cecile; Helleboid,
Laurent; Marmouz, Farid; Liard, Francois, Société Naxis, Lyon, Service
d’Ophtalmologie, Hôpital Tenon, Paris, Cabinet d’Immuno-Allergologie,
Pontoise, France Cabinet de Médecine Générale, Saint-Epain, France,
Therapie, Volume 59, Number 2, 2004 , pp. 259-264(6)
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