Keratos Association Européenne sur les pathologies de la surface oculaire et les dysfonctionnements du système lacrymal Afficher en Français Display in English  Acesso ao site em Portugês
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Kératites Neurotrophiques

Les neurodystrophies ou neurotrophies sont des troubles de la sensibilité/trophicité de la cornée (anesthésie et hypoesthésie de la cornée: pertes de sensibilité).

Définition:

Ce type de pathologie, appartenant aussi à la famille des maladies de la surface oculaire, est caractérisé par une anomalie/perte de sensibilité de la cornée associée à un déficit du métabolisme et de la vitalité de l'épithélium conduisant à une cicatrisation inadéquate (perte de la transparence/ néovascularisation de la cornée, qui est normalement dépourvue de vaisseaux sanguins pour assurer sa transparence) après la moindre blessure ou agression, et  même en leur absence (dans certains cas).

La perte de sensibilité peut être totale (anesthésie cornéenne) ou partielle (hypoesthésie de la cornée). La sensibilité peut être atteinte à plusieurs niveaux et être plus ou moins importante selon le type de sensibilité (sensation de douleur, de chaud ou froid, etc.).

Cette kératite est caractérisée par des plaies cornéennes (ulcères) dues à des troubles de la régénération des fonctions vitales de la cornée (dystrophie). Cette affection est le résultat d'un dysfonctionnement du nerf trijumeau qui est le nerf qui innerve cette partie du visage jusqu'à la surface de la cornée. 

  • La kératite Neurotrophique ou Neuroparalytique

La kératite neurotrophique a été décrite au début de XIXème siècle (Magendie, 1824). Elle s'initie par une érosion épithéliale récurrente, après un trauma léger ou même spontanément, et évolue vers des ulcérations plus graves et profondes. Elle apparaît, le plus souvent, comme un ulcère central ou proche du centre de la cornée, sans réels symptômes inflammatoires et une douleur a priori moindre à celle que l'on peut attendre pour la plupart des ulcères cornéens (du moins c'est ce que disent les médecins! parmi nos membres seuls 25% sont d'accord avec cette affirmation!).

  • Kératopathie ou Epithéliopathie Neurotrophique

Caractérisée par des érosions épithéliales récurrentes (EER) du fait de la perte de sensibilité, souvent associée à un déficit lacrymal, il s'agit en fait d'un terme plus usuel dans le monde anglo-saxon qui semble décrire un stade moins avancé de la maladie (puisqu'il concerne uniquement l'épithélium) .

Diagnostic:

Pour aider au diagnostic, au-delà des conséquences oculaires plus facilement observables, un simple test de sensibilité de contact au coton ou à l'esthésiomètre peut s'avérer utile, ainsi que l'instillation d'un collyre mydriatique légèrement irritant. L'historique médical du patient peut s'avérer essentiel (accident ou chirurgie affectant le trijumeau, maladie dégénérative, diabète, autres atteintes neurologiques, etc.) pour expliquer une atteinte de la branche ophtalmique du nerf trijumeau.

Causes:

Différentes affections ou maladies systémiques et oculaires peuvent provoquer une neurodystrophie de la cornée, dont : 

  • les atteintes du nerf trijumeau (soit accidentelles, soit chirurgicales comme pour soulager les névralgies faciales du trijumeau - rhizotomie - ou l'extraction d'une tumeur bénigne du nerf auditif - neurome acoutisque, lésions au niveau du noyau du nerf qui est comprimé par une tumeur du cerveau ou lésion importante du ganglion de Gasser),

  • le diabète mellitus,

  • les brûlures chimiques ou expositions aux fumées chimiques,

  • la sclérose en plaques,

  • les causes médicamenteuses telle que l'abus d'analgésiques locaux ou anti-inflammatoires non stéroïdiens,

  • le zona ophtalmique,

  • les infections virales oculaires comme l'herpès zoster ou simplex,

  • à la suite d'une greffe de cornée (kératoplastie) ou autre chirurgie de la cornée due à la section des nerfs,

  • chirurgie réfractive (LASIK, LASEK, EXCIMER), etc.

  • port des lentilles,

  • autres maladies auto-immunes pouvant conduire à des neuropathies périphériques (ex: maladie du greffon, syndrome de Goujerot),

  • diverses maladies neurologiques conduisant à la perte de sensibilité périphérique,

  • l'intoxication par des métaux lourds, tels que l'arsenic, certains produits chimiques, tels que le trichloréthylène.

Plus rarement, elle est l'un des symptômes d'une maladie congénitale ou héréditaire (dysautonomie familiale; neuropathies congénitales) touchant une partie voire l'ensemble du corps.

Contexte neurologique:

La cornée normale a la plus grande densité de nerfs sensoriels du corps humain, et est le tissu humain le plus sensible qui soit. Néanmoins, le réseau de l'innervation cornéenne reste en partie méconnu. L'une des principales raisons est que les cornées humaines récupérées sur les cadavres servent essentiellement de greffons (tellement les besoins sont insatisfaits) et sont donc peu destinées à la recherche.

La cornée est un tissu qui souffre constamment des agressions extérieures (vent, poussière, friction des paupières, etc.). Ainsi, une cornée insensible est moins à même de se protéger. Mais la simple perte de sensibilité ou de perception de la douleur n'explique pas tout. L'intégrité de la cornée est maintenue par la régénération, assurée en partie à la sensibilité mais aussi à d'autres apports trophiques du nerf (probablement des facteurs de croissance et nutriments), bien que le mécanisme exact ne soit pas connu. Or, ce mécanisme (de trophicité) est vraisemblablement essentiel au processus de régénération constante (et donc de cicatrisation) de la cornée. Il est désormais établi que la perte de sensibilité conduit notamment à une diminution de la prolifération des cellules souches en provenance du limbe, à un ralentissement du métabolisme et de la mitose (division) des cellules de la cornée et à des niveaux de acétylcholine moindres, pour ne citer que quelques différences avec une cornée normale.

Symptômes, conséquences neurologiques et sur la vision:

Cela a pour conséquence des ruptures fréquentes de l'épithélium défectueux, un retard ou une absence de cicatrisation de la cornée. De plus, la perte de sensibilité s'accompagne presque toujours d'une réduction de la fonction lacrymale, voire une réduction du clignement. Ainsi, au problème initial s'ajoute souvent une sécheresse oculaire et une meibomite qui aggravent davantage le scénario.

En termes de vision, la perte de sensibilité cornéenne peut conduire à l'opacification totale du fait des nombreuses cicatrices (suite aux érosions) ou à un ulcère neurotrophique perforant dans les cas les plus graves, conduisant à une cécité complète. Elle entraîne assez souvent un astigmatisme cicatriciel et donc irrégulier du fait des lésions et très difficile à corriger (excepté par des verres scléraux).

De ce fait, les principaux symptômes sont: les ulcères neurotrophiques (non inflammatoires), les érosions récurrentes, la sécheresse oculaire, la photophobie extrême, la néovascularisation de la cornée, l'opacification voire la perforation de la cornée, etc.

Traitements

Le traitement habituel consiste en une lubrification agressive (qui diffère peu de celle pour la sécheresse oculaire sévère), la tarsorraphie (en couvrant totalement ou une partie de la cornée notamment avec les paupières), mais ces traitements se révèlent souvent insatisfaisants (d'autant plus qu'ils empêchent la vision).  Dans certains cas, suite à la perforation due à un ulcère, il est nécessaire de greffer une cornée. Celle-ci ne restaure pas la vision fonctionnelle mais permet de sauver l'intégrité de l'oeil. La greffe de cornée est toujours à très gros risque dans un tel contexte.

Nouveaux traitements

Cette maladie, longtemps à l'abandon, devrait bénéficier de nouveaux traitements liés à l'hydratation (essentiellement destinés à la sécheresse oculaire ou aux dysfonctionnements lacrymaux), des nouveaux traitements biomédicaux (sérum, greffes de cellules souches autologues ou issues de tissus tels que le cordon ombilical, etc.), voire la recherche sur les facteurs de croissance. A ce jour, le traitement le plus innovant et disponible dans certains pays repose sur l'application d'un verre scléral. Ci-contre, un cliché d'utilisation d'un verre scléral sur un kératite neurotrophique.

 

Sur ce sujet, nous vous conseillons la lecture des rubriques suivantes et de notre newsletter.

Autres Conseils

Pour la plupart, les conseils à prodiguer sont semblables à ceux pour la sécheresse oculaire pour ce qui est d'éviter des facteurs de risque, de même en ce qui concerne les suppléances lacrymales et l'hydratation en général, notamment d'éviter l'utilisation de produits avec des conservateurs. Voir, à ce propos, notre page sur les réactions et effets des conservateursCouvre-oeil. D'autre part, les cornées neurotrophiques atteintes par la sécheresse oculaire devront bénéficier des nouvelles approches et produits pour minorer les conséquences de la sécheresse oculaire mais dont tous ne sont pas encore disponibles en Europe. 

Il est parfois utile de bien protéger l'oeil la nuit pour éviter toute érosion liée à la friction sur l'oeil ou les paupières par l'oreiller ou le lit. L'absence de sensibilité peut conduire à une ulcération traumatique sans que la personne s'en aperçoive. L'occlusion avec onguent  et même l'utilisation d'un couvre-œil (disponible en pharmacie) la nuit peuvent s'avérer alors très utiles. Mais il est fondamental d'apprendre à bien la réaliser car une occlusion mal faite risque d'être catastrophique. Ainsi il est utile de demander à son ophtalmologiste de faire une démonstration d'une bonne occlusion nocturne.  Ci-contre un couvre-œil.

 

Voir également notre section témoignages sur les neurotrophies et les témoignages sur les post-LASIK (formes plus légères suite à une chirurgie réfractive).

 

Parlez-nous de votre maladie et n'oubliez pas de témoigner de ses conséquences.

 

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