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les 6 étapes du paléolithique |
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une hypothèse
pour les gravures de CUSSAC
[nota : tous les liens s'ouvrent dans une seconde fenêtre,
ce qui permet notamment d'utiliser dans cette seconde fenêtre les
commandes "avant" et "arrière" du navigateur pour revoir les images
déjà chargées, ce qui est spécialement utile
lorsque des comparaisons d'images successives sont proposées.
La numérotation de chaque expression contient un lien,
tel que " a10 ",
qui permet d'accéder à une explication générale
de cet effet, ainsi qu'à d'autres exemples de son emploi.
Ces exemples contiennent à leur tour un lien qui permet d'accéder
directement aux analyses dont ils sont tirés]
Les gravures de Cussac ont été découvertes le 30
septembre 2000, et cette découverte a été révélée au public le 4 juillet 2001.
L'hypothèse qui est présentée ici est faite sur
la base des seules 4 photographies (plus une vue plus détaillée
de l'une d'elles) publiées sur le
site internet du Centre National de la Préhistoire de Périgueux du Ministère des Affaires Culturelles.
Des datations des ossements découverts sont en cours.
En attendant ces résultats, on peut faire des hypothèses basées sur le style des gravures.
mise à jour de 2008 :
Le résultat de ces datations est maintenant connu. Elles se révèlent tout à fait cohérentes avec mon hypothèse, mais elles ne permettent pas de conclure complètement sur la date exacte des gravures puisqu'elles n'en donnent qu'une ancienneté minimale. Je fais un commentaire de ces résultats dans une autre page du site. |
1- la datation par les ressemblances de style :
Pour le moment les préhistoriens suggèrent une fourchette
très large, qui va de 33 000 avant J.C. à 20 000 avant J.C.
J'ignore à quoi ressemble l'ensemble des 150 à 200 gravures
dès à présent dénombrées, mais les quelques
photographies publiées laissent effectivement beaucoup de possibilités
de datation, si l'on s'en rapporte à la seule ressemblance.
À priori ces figures ne ressemblent pas à celles de la grotte Chauvet (vers 30 000 à 28 000 avant J.C.), du moins à ses représentations les plus caractéristiques, telles que les rhinocéros en troupeau, le panneau des chevaux, ou ses têtes de lion.
La tête de cheval au centre du grand panneau ressemble beaucoup à une
autre tête de cheval, elle aussi gravée, de la grotte
de Gargas dans les Hautes Pyrénées. Surtout pour ce qui concerne
la façon de rendre la crinière par des traits bien espacés
perpendiculaires au centre de la forme. Les bisons de Cussac sont également traités de
façon semblable à ceux de Gargas, avec une alternance
de traits de contour continus et de traits en hachures décalées,
et les cornes représentées l'une à côté
de l'autre malgré la vue générale de profil de l'animal.
Hélas les gravures de Gargas sont très mal datées.
Un morceau d'os dans une fissure daterait de 25 000 à 24 000 avant
J.C., mais peut-on être certain qu'il y a une relation à faire entre ce fragment et les gravures ?
Par ailleurs, cette façon de faire les crinières se retrouve
aussi à la grotte Cosquer (vers 17 000 à 16 500 avant J.C.),
et sur certains animaux de Cussac la façon de faire les pattes par
deux traits qui se rapprochent puis font place à un seul, se retrouve
également en abondance à Cosquer : prenez le cheval isolé à droite sur la première image de Cussac
donnée par le Ministère, mettez lui la crinière du cheval central du grand panneau de Cussac, et vous
avez presque exactement le symétrique du cheval "Chv11" de Cosquer.
Pour revenir à la façon de faire les crinières, on peut aussi évoquer certains bisons de Niaux (vers 12 000 à
11 000 avant J.C.), quoique dans le cas de Niaux les traits sur le contour sont doublés de traits
situés à l'intérieur du volume de l'animal.
Au Tuc d'Audoubert
(Ariège) certaines figures de bison et de cheval se rapprochent
également de Cussac, et "une tête de créature fantastique"
peut aussi faire penser à celles de Cussac (à droite sur cette image), et ressemble étonnamment
à l'un des bisons de Cussac, bosse sur le nez comprise. Dans la grotte voisine des Trois-Frères,
des
superpositions nombreuses font aussi penser aux superpositions du panneau
central de Cussac, et d'ailleurs Cussac sera peut-être l'occasion
de se pencher à nouveau sur la question de la datation de certaines figures des Trois-Frères.
Pour finir, puisque les archéologues du Ministère évoquent Le Pech-Merle, le type de superpositions de Pech-Merle se rapproche effectivement plus de Cussac que ne le fait celui des Trois-Frères, et au Pech-Merle comme à Cussac on trouve des animaux aux jambes de taille très réduite par rapport à la taille générale du corps.
Le Pech-Merle (Lot) : relevé du panneau dit "des antilopes"
Source de l'image : Préhistoire de l'art occidental - Citadelles & Mazenod (nouvelle édition de 1995) - figure 360
Bref, si l'on se base seulement sur les ressemblances de style, la large
fourchette proposée en première analyse par le Ministère
n'est pas trop grande, et il me semble même requis de l'allonger
de 3 ou 4000 ans vers la fin, pour au moins inclure la période de
la grotte Cosquer.
nota du 6 octobre 2001 :
Dans le numéro du 4 octobre 2001 de la revue Nature, un article fait état des nouvelles datations réalisées notamment pour les peintures de la Grotte Chauvet. Ces datations réalisées par "spectrométrie de masse par accélérateur" confirment la datation qui en avait déjà été faite par la procédure du carbone 14 (de l'ordre de 28 000 ans avant J.C.). Certains préhistoriens ne s'étaient pas résignés à cette datation, et continuaient à utiliser la méthode de "la ressemblance stylistique" pour refuser une telle ancienneté aux peintures de la Grotte Chauvet. Un bon exemple de cette méthode et de l'impasse où elle conduit, est donnée par l'étude "La Grotte Chauvet archéologiquement datée" (rédigée en anglais) de Christian Züchner, que vous pouvez trouver en ligne dans le numéro 12 de février 2000 du bulletin en ligne TRACCE. Le chapitre 1 ci-dessus était un peu l'équivalent de cette étude et pourrait s'appeler de la même façon "La Grotte de Cussac archéologiquement datée". Cette méthode aurait amené à conclure par exemple, sur la base de la grande ressemblance entre un cheval de Cussac et un cheval de Cosquer, qu'ils ont été réalisés à la même époque, et comme la date du cheval de Cosquer est connue, la date du cheval de Cussac serait du même ordre, soit vers 17 000 à 16 500 avant J.C. Le chapitre 2 ci-dessous propose une autre méthode de datation, par l'analyse des effets paradoxaux. Elle conduit à une datation beaucoup plus ancienne, qui serait plutôt de l'ordre de 29 000 à 25 000 avant J.C. |
2 - mon hypothèse selon l'analyse des effets paradoxaux :
Au risque d'être démenti par la datation des ossements
qui sera faite, je vais m'efforcer de proposer une première datation
pour ces gravures. Je présente pour l'instant cette datation sous
forme d'hypothèse restant à confirmer. Ce n'est pas tant
la datation des ossements que j'attends pour être plus catégorique,
que la connaissance des autres gravures qui ne sont pas encore communiquées.
Par nature des effets paradoxaux sont toujours ambigus, et la connaissance
d'un grand nombre de figures datant d'une même époque, de
préférence traitées en style très différent,
permet de réduire l'incertitude en excluant de façon plus
sûre ceux des paradoxes qui, décidément, ne sont pas
compatibles avec l'une ou l'autre de ces figures.
. . . À moins bien sûr que ce ne soit moi qui manque de
finesse, et qui ne sache les reconnaître, et de cela aussi je me méfie.
Les deux effets paradoxaux qui me semblent pour le moment incontournables
sont le "ouvert-fermé" et le "ça se suit / sans se suivre".
On remarque que si ces deux effets sont bien là, cela suffit
pour classer les gravures de Cussac dans l'étape B0-12, c'est-à-dire celle de Chauvet et celle où j'ai
opté pour classer Gargas.
Disons tout de suite que c'est cette étape là qui a pour le moment mon choix, car les autres paradoxes en cause à cette étape
peuvent également s'y lire très clairement. En outre, ces paradoxes se combinent entre eux comme on doit l'attendre pour cette étape.
Je renvoie notamment à l'analyse du bison de Gargas, étant précisé que la suite
du développement que je vais faire ne sera peut-être pas bien compréhensible
si vous ne vous familiarisez pas au préalable avec mon type d'analyse, et celle du bison de Gargas peut être une bonne introduction à ce qui va suivre.
Les effets du paradoxe ouvert-fermé :
C'est la façon de faire les crinières à l'aide de hachures qui fait très fortement penser à ce paradoxe, et comme par hasard il s'agit de son expression a10-a qui s'appuie sur le paradoxe ça se suit / sans se suivre (les hachures perpendiculaires au sens du profil ouvrent le corps de l'animal sur l'extérieur).
croquis concernant la tête de Bison de Gargas - a10.a
[les liens sous les croquis ouvrent les images correspondantes dans la seconde fenêtre]
C'est ce paradoxe qui fait que les figures de Cussac peuvent faire penser à celles de Cosquer, car ce paradoxe là y est également présent, et le croquis ci dessous, fait pour le bouquetin de la grotte Cosquer pourrait très bien convenir pour le cheval isolé et les 2 bisons de la première vue donnée par le Ministère (le contour fermé laisse des brèches ouvertes sur l'extérieur du corps).
croquis concernant le bouquetin de la grotte Cosquer - a10.a
Comme je l'ai signalé pour l'étude de Gargas, ce traitement
peut également relever du paradoxe intérieur / extérieur a16, mais certains des autres paradoxes
qui devraient l'accompagner aux étapes B0-20 ou B0-21 ne semblent pas présents à Cussac.
Le pelage uniforme du mammouth (dernière image proposée par le Ministère) fait également penser au paradoxe ouvert / fermé dans son expression s11 (le regard suit facilement les traits dans un sens, et butte constamment contre des traits dans l'autre sens de lecture).
croquis concernant les rhinocéros en troupeau de la grotte Chauvet - s11
Le contraste entre le contour bien dessiné de ce mammouth (on suit facilement ce trait de contour qui reste ouvert pour notre regard) et son pelage qui bouche la vue comme un écran ou un rideau passé devant le mammouth, évoque quant à lui l'expression a2-1 du paradoxe.
croquis concernant la salle des taureaux de Lascaux - a2.1
On peut aussi observer le contraste entre les protubérances qui se referment pour former ses pieds, et les traits ouverts en leurs extrémités qui forment ses défenses et sa trompe. Il s'agit cette fois de l'expression a1-a du paradoxe.
croquis concernant la salle des taureaux de Lascaux - a1.a
Le grand profil de femme est fermé
par un cerne, mais l'absence de tout relief ou modelé en fait comme
une figure transparente, donc ouverte sur le fond qui la traverse. Surtout,
la cuisse ouvre son corps en le prolongeant d'une excroissance vers le
bas, mais en le fermant simultanément par une brutale réduction
en cône que l'on perçoit clairement comme physiologiquement
anormale. Mais cette fermeture "reste ouverte", car la jambe ne semble
jamais se refermer, et se prolonge longuement par deux traits écartés.
À gauche du mammouth, on trouve une petite figure qui semble également être une figure féminine.
Ses seins et son bras partent ensemble du même côté, mais d'une façon différente (paradoxe effet d'ensemble / autonomie, dans son expression s10 - voir croquis ci-dessous), et la façon des seins est de faire une forme fermée, alors que le bras forme un trait qui se prolonge longuement et qui reste ouvert à un prolongement possible en son extrémité : c'est l'expression a1-a du ouvert / fermé.
croquis concernant le panneau des chevaux de la grotte Chauvet - s10
Les effets du paradoxe ça se suit / sans se suivre, basculant sur ceux du paradoxe entraîné / retenu :
La présence du paradoxe ça se suit / sans se suivre est essentielle à relever s'il s'agit bien de l'étape B0-12, puisqu'il se trouve à cette étape une fois comme paradoxe "clef" des paradoxes d'état, et une fois comme paradoxe de transformation associé étroitement dans ses effets à l'autre paradoxe de transformation : l'entraîné / retenu. Ce second paradoxe se retrouve d'ailleurs également parmi les paradoxes d'état.
Les crinières en petits traits parallèles qui se suivent mais sont côte à côte (donc ne se suivent pas), relèvent de son expression a11.
croquis concernant la tête de Bison de Gargas - a11
L'alternance entre les traits qui suivent nettement le contour et ceux des hachures des crinières relèvent du paradoxe entraîné / retenu dans son expression a16 (on est entraîné à lire rapidement le contour au trait, et notre regard est longuement retenu sur les hachures), et dans son expression s16 (nous devons changer de mode de lecture).
croquis concernant la tête de Bison de Gargas - a16
croquis concernant la tête de Bison de Gargas - s16
Cette expression concerne plus spécialement le dessous du col du grand bison du grand panneau, où
le trait de contour et les hachures croisées se superposent : si l'on se laisse attirer à lire le trait de contour, on en est retenu
car il est constamment hachuré et nous devons renoncer à ce type de lecture.
De façon générale, tous ces papillotements de
traits hachurés d'importances équivalentes, relèvent
également de l'expression s11 du paradoxe entraîné / retenu.
croquis concernant la tête de Bison de Gargas - s11
Cette expression S11 vaut également pour tous les traits égaux qui forment les poils du mammouth : on
ne sait où spécialement poser notre regard sur cette toison, tellement tous ses endroits nous attirent de façon égale.
De cet effet on peut effectivement basculer vers le ça se suit / sans se suivre : les poils de la toison suivent nécessairement
le profil du mammouth, puisque notre réflexe nous dit que ces poils correspondent au même animal et que les poils et le profil qui les
arrêtent sont vus "ensemble". Donc notre réflexe fait que le contour suit les poils et marque la bordure de cette fourrure, mais
nous ne pouvons décidément pas faire se suivre visuellement le trait du contour et les traits de la fourrure : ils vont en sens croisés,
ils se croisent et ne se suivent donc pas (expression a16).
croquis concernant le félin abstrait de Vogelherd - a16
Sauf dans la trompe et sur les pieds : raison de plus pour qu'ils se suivent (à certains endroits) sans se suivre (la plupart du temps),
ce qui est cette fois l'expression a3 de ce paradoxe.
Dans le grand profil féminin, on peut évoquer l'expression s8 du paradoxe ça se suit / sans se suivre, tellement il ne suit pas l'anatomie normale, tout en la suivant suffisamment pour qu'on y reconnaisse une femme.
croquis concernant le félin abstrait de Vogelherd - s8
croquis concernant le profil féminin de Cussac - a9.b
Sur ce profil féminin, le paradoxe entraîné / retenu
peut se lire dans l'alternance des parties en ample arrondi que notre regard
suit rapidement, et les parties fortement contorsionnées (le ventre,
le sein, le bourrelé sur le dos, la tête) qui retiennent longuement
notre regard pour qu'il puisse les suivre soigneusement (expression a16 - voir croquis de Gargas plus haut).
L'attitude d'ensemble déséquilibrée de la forme, d'autant plus déséquilibrée d'ailleurs que ses jambes
fluettes semblent se dérober sous elle, évoque aussi l'expression
s6-2 de ce paradoxe.
L'exploitation la plus originale du paradoxe ça se suit / sans se suivre concerne les effets de superpositions partielles du grand panneau.
Envisageons d'abord la figure féminine prise entre les cornes
du grand bison, de telle sorte que les cornes du bison peuvent être
prises pour les bras de la femme. Les bras suivent le bas du corps de la
femme, avec le torse qu'ils suggèrent entre eux. Cependant, on lit
aussi clairement qu'il ne s'agit pas vraiment de bras et d'un torse, mais
des deux cornes du bison, donc ces traits ne suivent pas le bas du corps
féminin mais ils suivent le profil du bison en sens croisé.
Il s'agit de l'expression s7 de ce paradoxe.
croquis concernant la figurine de Malta - s7
Cet effet d'hésitation correspond également au paradoxe entraîné / retenu, dans son expression s5 : faut-il vraiment lire les cornes comme étant deux bras de femme ? Leur position nous y entraîne, mais le détail de leur forme se rétrécissant vers ce qui serait les épaules, nous retient de nous abandonner complètement à cette lecture.
croquis concernant les têtes de lion cubistes de la grotte Chauvet - s5
À l'autre bout du grand bison, du côté de sa queue, nous sommes cette fois entraînés à lire que sa queue
prolonge la bouche d'un autre animal à cornes. Mais cela ne peut être possible : nous devons nous retenir de cette impression que
ces traits prolongent la bouche, et admettre qu'il ne s'agit que de la
queue du grand bison (toujours expression s5 de l'entraîné / retenu).
Et, bien entendu, ces traits suivent la bouche et ne la suivent pas,
puisqu'il ne s'agit que de la queue du bison (expression a10-b du paradoxe ça se suit / sans se suivre).
Essayez de lire complètement le grand cheval central du panneau : pour le poitrail et la tête il n'y a pas de difficultés, mais si vous cherchez à suivre son dos, sa queue, ses jambes arrières, tout se brouille rapidement, et l'on se sait plus bien quel trait il faut suivre. Comme on ne perçoit pas de trait pour continuer la forme, on cherche à savoir précisément où commence le trait qui fait émerger ce cheval si fermement dessiné, mais, autant la tête est clairement localisable, autant on peine à trier les traits qui se trouvent vers son poitrail : de fait, on ne peut dire vraiment où le corps commence, ce qui correspond à l'expression s6 du paradoxe ça se suit / sans se suivre et à l'expression s5 de l'entraîné / retenu.
croquis concernant l'escalier de l'Opéra de Paris - s6 de ça se suit / sans se suivre
croquis concernant le panneau des chevaux de la grotte Chauvet - s5 de entraîné / retenu
Si l'on se porte maintenant sur les pattes avant, on voit sa patte gauche (à droite sur le dessin) parfaitement formée. Mais qu'est-ce tout à sa gauche ? Sa patte droite ? C'est ce que l'on doit s'attendre à trouver à cet endroit, mais sa dimension n'est pas compatible (elle est trop petite). Et pourquoi marquer un trait de séparation sous le poitrail, comme si la patte était derrière lui ? N'est-ce pas plutôt la patte d'une autre animal derrière ? Mais alors, pourquoi le sabot parait-il comme en avant du sabot de l'autre patte ? Bref, nous sommes entraînés à lire ici la patte droite du cheval et son sabot, mais nous en sommes retenus du fait d'anomalies qui, alors, nous apparaissent incompatibles avec cette lecture suggérée (expression s5 de l'entraîné / retenu). Et dans le même temps cette patte droite suit bien le profil du cheval à son emplacement normal, mais elle ne le suit pas réellement à cause des mêmes incompatibilités, notamment celle qui concerne sa taille bien trop petite (expression s8 du paradoxe ça se suit / sans se suivre).
croquis concernant le cheval de Vogelherd - s8
Non sans difficulté on peut suivre le contour complet du grand
bison, mais quand, en faisant cette recherche, on constate la taille minuscule de ses deux pattes arrières, on se dit que des pattes
de cette taille là ne peuvent pas vraiment suivre un corps aussi vaste. On retrouve ici les deux effets décrits pour la fausse-vraie patte de droite du cheval.
Les deux pattes avant du bison nous proposent un autre effet : le sabot à droite suit bien la patte située à droite (la patte
de gauche du bison), mais l'autre sabot lui ne suit pas sa patte (expression
s15
du paradoxe ça se suit / sans se suivre) alors que nous étions entraînés à faire la même lecture (expression
s5
de l'entraîné / retenu), et ces deux effets utilisent une patte fermée par son sabot et une autre patte laissée elle
ouverte en son extrémité du fait de l'absence de sabot (expression
a1-a de l'ouvert / fermé).
croquis concernant les rhinocéros en troupeau de la grotte Chauvet - s15 de ça se suit / sans se suivre
croquis concernant la salle des taureaux de Lascaux - a1.a de ouvert / fermé
Si l'on considère l'ensemble des graphismes situés vers l'arrière du grand bison et du cheval, on constate une superposition de contours qui relèvent d'animaux qui partent en tous sens. Tous ces contours sont fermement dessinés, et l'on voit bien qu'il y a un animal à la suite de chacun de ces tracés (formé par chacun de ces tracés), mais on ne sait pas comment envisager une lecture d'ensemble de tous ces animaux tellement ils se contrarient mutuellement (expression s7 du paradoxe ça se suit / sans se suivre et s6-a de l'entraîné / retenu).
croquis concernant les rhinocéros en troupeau de la grotte Chauvet - s6.1 de entraîné / retenu
Les cornes et les pattes du grand bison sont vues côte à côte, ce qui est incompatible avec la vision de profil que l'on en a (expression a12 du paradoxe ça se suit / sans se suivre).
croquis concernant la tête de Bison de Gargas - a12 de ça se suit / sans se suivre
Mais ce type d'effet est ici encore plus affirmé sur l'animal situé sur la gauche : on voit sa croupe et sa queue en vue plongeante depuis le dessus de l'animal, et ses deux pattes arrière sont côte à côte comme sur une vue de côté.
On peut aussi considérer comment cette expression a12 du paradoxe ça se suit / sans se suivre se combine étroitement ici avec l'expression s7 de l'entraîné / retenu.
croquis concernant les rhinocéros en troupeau de la grotte Chauvet - s7 de entraîné / retenu
Les effets du paradoxe effet d'ensemble / autonomie :
Restons d'abord sur ce grand panneau.
Les animaux qui s'y superposent forment ensemble un effet de superposition mutuelle, tout en restant chacun clairement autonome. Il s'agit de l'expression
s14 du paradoxe.
L'animal de gauche regroupe sur un même profil, comme on l'a vu plus haut, une vue "d'en haut" et une vue "de côté" qui
sont clairement incompatibles l'une avec l'autre. C'est l'expression a5 du paradoxe.
croquis concernant les rhinocéros en troupeau de la grotte Chauvet - a5
Revenons sur la femme enserrée entre les cornes du bison qui lui servent de bras : le corps de la femme prolonge ces cornes/ bras, et le profil du bison, qui forme une figure clairement autonome de celle de la femme, utilise lui aussi ces mêmes cornes. Il s'agit là de l'expression a2 du paradoxe.
Les deux pattes avant du cheval central ont la même forme, mais elles sont d'échelle différente et l'attache de l'une est beaucoup plus fluette que celle de l'autre. Il s'agit de l'expression s10 du paradoxe, que l'on retrouve également dans la représentation des deux pattes avant du bison : ce sont les mêmes et elles quittent le corps de la même façon, mais l'une a un sabot et l'autre n'en a pas.
croquis concernant les têtes de lion cubistes de la grotte Chauvet - s10
Changeons de panneau et venons en au panneau qui représente des bisons (dont l'un très partiel) et
sur la droite un cheval "à la Cosquer".
Le contour de chacun de ces animaux est constitué de traits bien autonomes (puisqu'ils sont séparés et ne se touchent
pas), qui néanmoins construisent ensemble le profil de l'animal
: c'est leur effet d'ensemble, correspondant à l'expression a10
de ce paradoxe. Au passage, notons que ces traits se suivent sur le contour, mais sans se suivre réellement puisqu'ils sont séparés
les uns des autres (expression s10
du paradoxe ça se suit / sans se suivre et a7 de l'entraîné / retenu).
croquis concernant la tête de Bison de Gargas - a10 de mouvement d'ensemble / autonomie
croquis concernant les rhinocéros en troupeau de la grotte Chauvet - s10 de ça se suit / sans se suivre
Pour finir, le mammouth poilu. Sa représentation combine ensemble deux graphismes complètement
différents qui se complètent mutuellement pour suggérer la notion de mammouth : une trame de hachures qui forme sa surface, et
un trait continu qui forme son contour. Il s'agit de l'expression a14 du paradoxe effet d'ensemble / autonomie.
Mais bien sûr, la surface de la toison est elle-même un effet de texture d'ensemble, qui est construite à l'aide de traits
de hachure qui sont autonomes les uns des autres : c'est l'expression a11.
3 - Conclusion provisoire :
Si l'ensemble de la théorie que je présente sur ce site est pertinente, et si ma capacité à isoler correctement les
effets est suffisante, alors, les quelques représentations actuellement disponibles de la grotte de Cussac, placent la gravure de ces figures dans
l'étape que j'ai numérotée B0-12. C'est-à-dire à l'Aurignacien récent.
Cette étape est la même que celle de la grotte Chauvet, que la figurine de Malta, et que les gravures de Gargas.
Cela placerait ces gravures dans une fourchette qui va environ de 29 000 ans avant J.C. à environ 25 000 ans avant J.C.
Les figures ouvertes / fermées de la grotte de Cussac (ouvertes
par les crinières et par les parties non jointives des traits de contour) me semblent une bonne raison pour les dater de cette époque,
mais cela ne me semble pas une raison décisive, car les images beaucoup plus tardives de la grotte Cosquer présentent
les mêmes particularités.
Finalement, ce qui me semble actuellement décisif, c'est l'emploi de points de vue complètement contradictoires sur le profil d'un
même animal, tel que cette croupe vue de dessus et qui se continue par des pattes vues de côté.
Traité dans un tout autre style, cela rejoint néanmoins le puissant effet de combinaisons de perspectives inverses du troupeau de la grotte Chauvet, et les effets cubistes des têtes de lion de la même grotte, une vue de profil comportant très anormalement deux yeux.
l'effet de perspectives contradictoires imbriquées des rhinocéros en troupeau de la grotte Chauvet
l'effet du profil aux deux yeux des lions "cubistes" de la grotte Chauvet [à droite : "Femme assise" de Picasso - 1932]
Je ne l'avais pas indiqué au passage, mais on peut revenir aussi sur cette figure féminine de Cussac, qui combine dans une vue synthétique un corps vu de profil, des seins vus de dessus, et un bras vu inextricablement de profil et de dessus.
Remarquez comme les temps changent : on n'en est plus à se demander si ces figures sont assez frustes et malhabiles pour être aussi anciennes et "primitives", mais à se demander si elles sont assez subtilement cubistes pour mériter de relever de l'Aurignacien.
J'attends de disposer d'autres gravures pour aller plus loin, et de disposer des résultats des datations d'ossements (nota : ces dates sont maintenant connues).
Si je suis amené à confirmer cette hypothèse, je présenterai pour Cussac des analyses avec croquis, du type de
celles que j'ai faites pour les autres exemples du paléotithique.
Tours, le 31 juillet 2001
[mise à jour des liens vers les fiches de présentation des paradoxes : le 11 novembre 2006]
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