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le temple d'Athéna Niké
un chapiteau ionique
un chapiteau corinthien (qui relève de l'étape suivante)
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L'Érechthéion
Même si je dois me fâcher avec l'Académie, mon opinion
est que la réputation du Parthénon d'Athènes est surfaite
: il ne s'agit que du perfectionnement ultime d'une formule architecturale
qui avait été progressivement mise au point pendant presque
deux siècles. Pour aggraver mon cas, j'ajouterai que je trouve la
formule "dorique" du temple grec un peu sèche.
Très souvent cependant, les temples doriques étaient intégrés
à un environnement très dissymétrique, voir intégrés
dans une pente en lacet, de telle sorte que leur rigidité symétrique
n'était en fait qu'une ponctuation symétrique dans une composition
d'ensemble très variée. Rien à voir donc, avec son emploi
dans les compositions académiques classiques.
Plus que le Parthénon, le chef-d'oeuvre de l'Acropole d'Athènes
est selon moi l'Érechthéion, et je brûle d'en voir une
reconstitution en image de synthèse qui permette vraiment d'en éprouver
les relations de formes, sans qu'elles soient brouillées par l'aspect
ruiné qu'en donnent les photographies, notamment pour ce qui concerne
sa toiture.
Sa construction se situe entre 421 et 406 avant J.C., c'est-à-dire
qu'elle débuta une dizaine d'année environ après la
fin du Parthénon. À la différence du Parthénon
on ne lui connaît pas de modèle, et sa disposition complexe
doit beaucoup au fait qu'il se situe à l'articulation entre deux niveaux
de terrain très décalés l'un de l'autre.
Si j'ai une faiblesse particulière pour l'Érechthéion,
c'est que ce bâtiment est pour moi le prototype même de l'expression
plastique du paradoxe "lié / indépendant", paradoxe qui a pour
cette étape un double rôle "clef", puisqu'il est à la
fois de dernier des paradoxes de transformation et le dernier des paradoxes
d'état.
L'expression de ce paradoxe est d'autant plus intéressante ici que,
pour toutes les dispositions qui sont caractéristiques à l'Érechthéion,
c'est-à-dire la disposition de ses différentes masses, il s'agit
d'expressions de type analytique, donc d'expressions où les aspects
de "lié" et les aspects "d'indépendance" sont chacun bien isolables.
Ces deux aspects se trouvent en outre renforcés et clarifiés
par leur association avec les deux aspects du paradoxe "rassembler / séparer"
: dans l'Érechthéion le lien clairement rassemble, et les éléments
indépendants qui sont ainsi rassemblés, sont d'autant plus
indépendants les uns des autres qu'ils sont bien séparés.
vue en plan
Expressions du lié / indépendant associé au rassembler / séparer
1- Commençons par sa disposition d'ensemble : sur un volume principal
sont accrochés des portiques qui sont autant d'appendices, d'annexes
complètement indépendantes les unes des autres, et qui sont
seulement liées entre elles par ce volume principal qui les réunit.
Les portiques sont d'autant plus indépendants les uns des autres qu'ils
sont tous orientés différemment, qu'ils n'ont pas leur accès
au même niveau du terrain, et qu'ils n'ont pas la même hauteur.
Celui situé en pignon Ouest se distingue par son aspect de loggia
décalée en hauteur, et celui au Sud est nettement plus petit
que tous les autres, il n'a pas de toit en pente et ses colonnes sont remplacées
par des statues (les Cariatides). Celui orienté au Nord ressemble
par son aspect à celui situé en pignon Est, mais il est situé
latéralement en excroissance sur le volume principal, tandis que l'autre
est dans le prolongement même de ce volume.
Il s'agit là d'une expression analytique de type a13 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a13 du rassembler / séparer.
2- Les différences que l'on vient de souligner entre tous les portiques
qui sont greffés sur le volume principal, induisent d'autres effets
de lié / indépendant.
Ainsi, les deux portiques situés en pignon sont bien liés au
volume principal, continus avec lui, noyés même en lui pour
ce qui concerne le portique / loggia Ouest, tandis que les deux autres sont
clairement indépendants de ce volume principal, et seulement accolés
à lui sous forme d'excroissances.
Il s'agit d'une expression analytique de type a7 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a6 du rassembler / séparer.
3- Si l'on oublie le volume principal qui les relie, et que l'on considère
seulement les portiques, alors la similitude de leurs formes et de leurs
situations en appendice, nous les fait lier ensemble dans notre perception.
Dans le même temps, leurs différences de formes et d'orientations
nous permet de ne pas perdre de vue qu'ils sont bien indépendants
les uns des autres.
Il s'agit d'une expression analytique de type a16 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a11 du rassembler / séparer.
4- Chaque portique (sauf celui aux Cariatides) lie dans une forme d'ensemble
bien lisible en tant que telle, une colonnade, un entablement, un fronton
triangulaire, et un pan de mur en arrière plan. Ces différentes
parties restent bien distinguables les unes des autres.
Il s'agit d'une expression analytique de type a15 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a15 du rassembler / séparer.
5- Comme dans le style dorique du Parthénon, les colonnes bien indépendantes
sont liées entre elles par l'entablement qui les attachent par en
dessus, ce qui vaut spécialement pour les Cariatides auxquelles on
peut facilement s'identifier puisqu'il s'agit de personnages. Bien que parfaitement
isolées, écartées les unes des autres, elles sont ficelées
ensemble par ce lien qui pèse sur leurs têtes.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s15 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a6 du rassembler / séparer.
6- Comme dans le style dorique aussi, mais l'effet est ici beaucoup moins
présent qu'au Parthénon qui lui est entouré de colonnes,
les colonnes (ou les Cariatides) forment, par leur répétition,
un effet de colonnade qui les lie en groupe de formes semblables. Cette mise
en groupe ne nuit pas à leur isolement, chacune étant bien
écartée des autres par un vide.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s11 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a11 du rassembler / séparer.
7- Dans le cas particulier du portique Est qui prolonge le bâtiment
principal, l'entablement continu le relie fermement par le haut au mur latéral
nu de ce bâtiment principal, tandis que l'écart que font les
colonnes, le vide qui les sépare de ce mur latéral, marquent
bien son indépendance du corps de bâtiment principal.
Il s'agit d'une expression analytique de type a8 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a6 du rassembler / séparer.
8- L'avancée de ce portique amène à lire l'entablement
du haut du mur comme un trait autonome qui se prolonge jusque sur la colonne
d'extrémité. En même temps, on voit bien que l'entablement
continue par en haut la surface du mur. Or, cette surface du mur, précisément
parce qu'elle est une surface, n'est pas lue par notre perception de la même
façon qu'un trait linéaire.
L'entablement est donc lié sur presque toute sa longueur à
la surface du mur, mais contrairement à elle il ne se lit pas comme
une surface, mais comme un trajet autonome.
Il s'agit d'une expression analytique de type a4 du lié / indépendant.
Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a15 du rassembler / séparer.
Expressions isolées du rassembler /séparer
1- Tous les portiques, d'une façon ou d'une autre, font un effet de
séparation : celui du pignon Est s'écarte du volume principal,
celui du pignon Ouest retranche ses colonnes du sol et met son mur du fond
en retrait de la façade du pignon, ceux du Nord et du Sud se mettent
franchement sur le côté. Or, précisément, cet
effet de séparation ou de retrait du volume principal qu'ils font
tous, chacun à leur manière, nous les font rapprocher visuellement,
nous les font rassembler visuellement.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s11 du rassembler / séparer.
2- Le corps du bâtiment principal, simplement parallèlipédique,
fermé par des murs latéraux continus et nus, rassemble clairement
le volume qu'il renferme en une unité compacte.
Par différence, les portiques qui l'entourent forment des volumes
bien séparés ou qui éclatent le bâtiment en multiples
annexes.
Il s'agit d'une expression analytique de type a4 du rassembler / séparer.
Expressions du synchronisé / incommensurable
Par principe, une combinaison de paradoxes ne peut être équilibrée
: elle n'est toujours qu'une tentative de mise en équilibre, et elle
penche forcément plutôt vers les uns que vers les autres.
On a vu dans les paragraphes précédents, que dans l'Érechthéion
les paradoxes liés / indépendants et rassembler / séparer
ont la part belle. Il en va d'ailleurs de même dans toutes les expressions
du style dit "ionique", et c'est cela qui génère la différence
d'allure entre les oeuvres de style ionique et celles de style dorique.
Nécessairement, si ces deux paradoxes sont sur-représentés,
ou plutôt sur-exprimés, ce sont les deux autres qui sont mis
en berne et qui ont des expressions plus modérées que celles
qu'ils ont par exemple dans le Parthénon.
Commençons par le synchronisé / incommensurable qui, comme
les deux déjà envisagés, fait partie à la fois
des paradoxes d'état et des paradoxes de transformation.
1- Les trois portiques à fronton font le même effet précisément
de "portique à fronton", c'est-à-dire de colonnade surmontée
d'un entablement et d'un fronton triangulaire.
Mais s'ils se synchronisent pour tous produire le même effet, ils dirigent
leurs frontons vers des directions tellement autonomes que l'on ne peut pas,
physiquement, voir tous les trois frontons en même temps.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s16 du synchronisé / incommensurable.
2- Le quatrième portique, celui aux Cariatides, ne participe pas à
l'expression précédente, mais le remplacement de ses colonnes
par des personnages est l'occasion d'une expression spécifique : les
femmes sculptées synchronisent en effet leur position et leur fonction
à celles que jouent les colonnes dans les autres portiques, mais il
est évident pour notre instinct qu'une femme n'a rien à voir
avec une colonne d'architecture, qu'il s'agit de réalités sans
aucun rapport entre elles.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s10 du synchronisé / incommensurable.
3- Dans le cas du portique Est qui prolonge le corps de bâtiment principal,
vu de côté il forme avec ce bâtiment principal une figure
clairement lisible.
Cette figure se compose pourtant de l'assemblage de trois formes qui sont
générées de façons complètement étrangères
les unes des autres :
- on a d'abord le grand mur nu, qui se lit fondamentalement comme une surface plate ;
- on a ensuite l'entablement qui dessine sous le débord du toit une figure qu'on lit comme un trait linéaire ;
- et il y a le cylindre vertical de la colonne d'extrémité,
qui se lit à la fois comme un trajet vertical et comme une surface
repliée en boucle sur elle-même.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s4 du synchronisé / incommensurable.
4- Pour chaque portique à colonnes, comme au Parthénon nous
retrouvons l'effet des colonnes verticales bien autonomes qui suivent des
parcours bien séparés et qui pourtant s'arrêtent en parfait
synchronisme.
Il s'agit d'une expression analytique de type a16 du synchronisé / incommensurable.
5- Du fait de la dispersion des différents portiques, qui ne démarrent
pas tous au même niveau de sol (en particulier celui de l'extrémité
Ouest qui commence très haut perché par rapport à son
voisin du Nord), et qui ne se tournent pas vers les mêmes directions,
à l'effet précédent qui vaut pour chaque portique pris
individuellement, s'ajoute l'effet d'étonnement de la synchronisation
collective de cet effet si l'on considère maintenant tous les portiques
ensemble.
Il s'agit cette fois d'une expression analytique de type a5 du synchronisé / incommensurable.
Expressions du continu / coupé
1- Si l'on considère d'abord l'effet d'ensemble des diverses masses,
on constate que le corps de bâtiment principal qui poursuit longuement
en continu son volume et son toit, fait ainsi contraste avec le portique
Nord et celui des Cariatides, qui sont eux des volumes qui apparaissent tronqués
par comparaison.
Ils apparaissent tronqués par ce qu'ils sont beaucoup plus courts
en profondeur, mais aussi parce qu'ils viennent s'interrompre en butant contre
le bâtiment principal, ce qui est spécialement sensible pour
le portique aux Cariatides dont la ribambelle doit physiquement s'interrompre
lorsqu'elle vient à buter contre lui.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s6 du continu / coupé.
2- Les différentes parties du bâtiment forment un ensemble continu,
dans le sens où tous les volumes se poursuivent sans laisser de brèches
entre eux. Mais régulièrement dans cette continuité
bâtie, s'affirme un portique qui se démarque du corps de bâtiment
principal, et qui souligne ainsi une étape, un moment distinct de
la volumétrie.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s14 du continu / coupé.
3- Considérons le portique Est qui prolonge le bâtiment principal.
Au niveau du toit et de l'entablement qui règne en haut du mur, effectivement
il prolonge en continu le bâtiment principal.
Mais ses colonnes sont en avant, elles sont coupées du bâtiment
principal par un écart, une avancée au-delà d'un vide.
Il s'agit d'une expression analytique de type a5 du continu / coupé.
4- Toujours à propos de ce portique Est et de sa relation au mur latéral
aveugle qu'il prolonge : la surface de ce mur se prolonge en continu dans
la surface de l'entablement du dessus, mais cet entablement ne se lit pas
fondamentalement de bas en haut comme une surface, mais comme un trait horizontal
linéraire qui va jusque sur la colonne qui est au-delà du mur.
Sous cet aspect, sa lecture forme donc une étape distincte de celle
de la surface du mur.
Il s'agit d'une expression analytique de type a4
du continu / coupé.
5- Le portique Nord est en situation différente par rapport au corps
de bâtiment principal : son mur du fond prolonge le mur Nord de ce
dernier, c'est-à-dire qu'il le fait continuer au delà du volume
propre au bâtiment principal. Mais en procédant ainsi, il en
montre la tranche.
Si l'on considère le rapport entre la continuité du mur et
sa tranche qu'il met ainsi en évidence, il s'agit d'une expression
synthétique de type s12 du continu / coupé.
6- Et si l'on considère que la partie la plus à l'Ouest du
mur du fond de ce portique peut être lue soit comme une continuité
du mur Nord du bâtiment principal, soit comme l'endroit où ce
portique est brutalement coupé, laissé sans volume derrière
lui, alors il s'agit d'une expression analytique de type a2 du continu
/ coupé.
Cet effet se lit spécialement sur le plan du bâtiment (voir sa représentation plus haut)
7- Le portique Ouest fait un effet de loggia, c'est-à-dire qu'il marque
une coupure en creux dans la continuité du mur du pignon Ouest du
Bâtiment.
Il s'agit d'une expression analytique de type a10 du continu / coupé.
8- Les Cariatides tranchent avec le traitement par colonnes des autres portiques,
et comme nous n'arrivons pas à imaginer que des femmes réelles
puissent être ainsi en position de servir à soutenir un toit
sur leur tête, tout en prenant réellement en compte leur présence,
une partie de notre perception nie leur présence, refuse d'en tenir compte.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s2 du continu / coupé.
9- Comme les colonnes qui ceinturent le Parthénon, les Cariatides
forment une bande continue qui se plisse à chaque angle du bâtiment.
Ce qui vaut aussi pour les colonnes du portique Nord.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s3 du continu / coupé.
10- Comme les colonnes du Parthénon, les colonnes et les Cariatides
de chaque portique forment chaque fois une répétition de colonnes
bien coupées les unes des autres, répétition qui
se confronte à la continuité du trait horizontal que forme
l'entablement qui les surmonte et les réunit.
Il s'agit d'une expression analytique de type a7 du continu / coupé.
11- Pour finir, comme les colonnes du Parthénon également,
celles des portiques dessinent de longs trajets verticaux continus, qui brutalement
s'interrompent sur un chapiteau.
Il s'agit d'une expression synthétique de type s1 du continu / coupé.
Ces colonnes forment des trajets continus bien coupés (au sens de
séparés) les uns des autres, ce qui correspond cette fois à
une expression analytique de type a16 du continu / coupé.
Dernière mise à jour : le 7 mai 2006
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